L’auteur
Quentin Deluermoz est maître de conférences à l’université Paris-13 Nord, et membre de l’Institut universitaire de France. Spécialiste du XIXe siècle, il a publié plusieurs travaux qui portent sur l’histoire de la police et sur la vie politique en France, en particulier sur la Commune de Paris. Outre Le Crépuscule des révolutions (2012), il a publié Chroniques du Paris apache (2008). Sa thèse, soutenue en 2006 est consacrée aux Policiers dans la ville. La construction d’un ordre public à Paris (1854-1914). En outre, il a publié avec Pierre Singaravélou en 2016 un ouvrage consacré à l’histoire contrefactuelle (Pour une histoire des possibles : analyses contrefactuelles et futurs non advenus), élargissant ainsi ses travaux au champ de l’épistémologie de l’histoire et de ses renouvellements.
L’ouvrage
Son ouvrage Le crépuscule des révolutions fait partie de la collection dirigée par Johann Chapoutot, « Histoire de la France contemporaine », dont le projet est de proposer une nouvelle approche de la période contemporaine en France, dans la continuité de la Nouvelle histoire de la France contemporaine. Il s’agissait de tenir compte des mises à jour historiographiques et de certaines approches nouvelles. Le Crépuscule des révolutions est d’abord une synthèse, qui trouve sa raison d’être dans un vaste projet d’écriture d’une histoire de la France contemporaine, par une nouvelle génération d’historiens. La précédente série, lancée par Michel Winock, commençait à être datée, en raison des renouvellements importants de l’historiographie au cours des dernières décennies. Ainsi, les découpages chronologiques entre les ouvrages de la collection sont différents, et ce pour deux raisons : la nouvelle collection contient deux fois moins de tomes que la précédente, et certaines dates de rupture ont été relativisées. C’est le cas dans l’ouvrage de Q. Deluermoz, ainsi qu’il s’en justifie dans sa préface : « les bornes retenues […] invitent à souligner le rôle des révolutions ou des crises politiques, partant à mettre en valeur irrégularités ou discontinuités. Chaque fois, en février 1848, en juin 1848, en mars 1871, le cycle des révolutions, hanté du souvenir de 1789-1793, semble s’ouvrir. » (p. 7-8).
Concernant le cadre politique, l’ouvrage inclut donc la Deuxième République, puis le Second Empire, et enfin le tout début de la jeune IIIe République encore balbutiante lors de l’ « année terrible ». La progression du livre est globalement chronologique (les trois premiers chapitres, ainsi que les trois derniers, sont consacrés à l’évolution politique au cours de la période, avec une insistance particulière sur les révolutions comme grille d’analyse : les mouvements de 1848, puis de décembre 1851, et enfin de 1870-1871 sont envisagés au-delà des seuls événements insurrectionnels pour les situer dans un contexte plus global, tandis qu’ils sont mis en perspective entre eux et, surtout, avec la Révolution française qui apparaît pour beaucoup comme un mythe fondateur. L’imaginaire révolutionnaire est bien présente, et structure les pratiques et les représentations.
Table des matières
Chapitre 1 : La République advenue (février-juin 1848)
Chapitre 2 : L’expérience de la Deuxième République (juin 1848 – décembre 1851)
Chapitre 3 Le Second Empire ou la démocratie illibérale
Chapitre 4 : Un territoire un peu plus national
Chapitre 5 : Une société verrouillée ?
Chapitre 6 : Corps et âme : contention et débordement
Chapitre 7 : Le Second Empire est un empire
Chapitre 8 : Un réveil politique plus ou moins contrôlé
Chapitre 9 : 1870-1871, l’année terrible : la France dans la tourmente
Chapitre 10 : 1871. A la croisée des chemins, une nouvelle République ?
Chapitre 1 : La République advenue (février-juin 1848)
La période s’ouvre avec les deux révolutions de février et juin 1848.
Le révolution de 1848 est apparue comme une surprise. Q. Deluermoz parle « d’une succession d’interactions et d’interprétations tantôt contradictoires, tantôt convergentes, entraînant de la part des autorités comme de la population des choix et des actions plus ou moins ajustés, qui finirent par produire de l’événement, c’est-à-dire du nouveau, de l’inédit » (p 17). L’insurrection de février 1848 est particulièrement marquante pour la rapidité des évènements qui se sont succédés. En effet, c’est le renouvellement de l’interdiction un banquet républicain par le Président du Conseil François Guizot qui met le feu aux poudres, le 21 janvier ; en un mois, Louis-Philippe démissionne, rendant manifeste la vacance du pouvoir. Pour expliquer l’ampleur du mouvement insurrectionnel, qui est maté par une répression sanglante, Q. Deluermoz invoque un certain nombre de causes : refus d’élargir le suffrage, une crise de confiance plus générale, la sévérité accrue du régime, divers scandales financiers dans les années 1840, et la crise économique et sociale. Le nouveau régime républicain prend des décisions d’ampleur, marquantes par leur radicalité politique : rapidement après la proclamation de la république, le droit au travail et le droit d’association sont réaffirmés.
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