Tito Lessi (1892) Galilée instruisant le mathématicien Vincenzo Viviani. Exposée au Museo Galileo

Les procès de Galilée, entre science, droit et politique

La compréhension de l’événement historique que fut le procès de Galilée en 1633 est obstruée par les réécritures de l’histoire aux siècles suivants. À elle seule, cette réécriture et ces interprétations historiographiques pourraient faire l’objet d’une étude à part, comme un chapitre à écrire sur la mémoire de Galilée après sa mort Le programme de Terminale propose une démarche similaire et tout à fait intéressante en faisant réfléchir les élèves sur la mémoire de la seconde guerre mondiale ou de la guerre d’Algérie. . Bien comprendre le contexte de l’événement suppose d’avoir à l’esprit le cadre politique de son temps (notamment la fracturation de l’Italie en plusieurs principautés adverses), l’histoire longue des sciences et de la controverse sur la rotation de la Terre (Galilée étant l’un des maillons de cette controverse), le fonctionnement de l’Inquisition romaine Inquisition romaine qui est sensiblement différente de l’inquisition médiévale et de l’inquisition espagnole., structure juridique qui a organisé le procès, le cadre intellectuel et religieux de l’Europe au XVIe siècle, dont la fracturation entre catholiques et réformés. Autant d’éléments qui ne sont pas immédiats et qui empêchent nos contemporains de bien saisir les enjeux et les raisons d’un tel procès.
L’historien dispose aujourd’hui d’un matériel très complet pour appréhender la compréhension de l’événement. La plupart des documents ont été publiés, dont les minutes du procès de Galilée . Un immense travail philologique et épistémologique a été réalisé depuis le milieu du XIXe siècle et la biographie est abondante, aussi bien sur Galilée lui-même que sur l’histoire des sciences. Tentons ici d’en dresser l’actualité et d’en comprendre les déroulements.

I/ Le contexte : Galilée dans la controverse scientifique

1/ L’hypothèse de la rotation de la Terre

Galilée n’est pas le découvreur de la théorie qu’il défend. Il doit beaucoup à Copernic, qui a été l’un des premiers à critiquer le système de Ptolémée et à publier sur le sujet. Copernic s’est lui-même inspiré de Nicolas Oresme (XIVe siècle) et d’auteurs de l’Antiquité. Il rappelle en effet dans ses écrits que la découverte de l’héliocentrisme lui est venue en étudiant les auteurs grecs et notamment Apollonius de Perga (262-190) et les pythagoriciens Nicétas et Héraclidès. Copernic n’a donc pas créé quelque chose de nouveau, il a actualisé une idée ancienne que ces auteurs grecs ont probablement trouvée chez les Égyptiens et les Babyloniens. Copernic a toutefois conscience d’apporter une nouveauté, qui consiste en l’actualisation d’une idée ancienne. La mobilité de la Terre est connue depuis longtemps : Nicolas Oresme l’évoque dans son Traité du Ciel et du Monde paru en 1377. Par la suite, Nicolas de Cues évoque le mouvement de la Terre. Voici ce qu’il écrit dans son De docta ignorantia :

« Il est évident pour nous que cette Terre se meut réellement, mais nous ne nous en apercevons pas, car nous ne pouvons saisir le mouvement que par la comparaison avec un point fixe. De docta ignorantia. Cité par Pierre Aubanel, Le génie sous la tiare. Urbain VIII et Galilée, Paris, Fayard, 1929, p.20.
Dans le livre II, chap. 12 de ce livre il conclut que « la machine du monde » a son centre « partout et sa circonférence nulle part », puisque « sa circonférence et son centre sont Dieu », qui est « partout et nulle part ».
»

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