Voici une Documentation photographique attendue ! Portant sur la question de Tronc Commun du concours de l’ENS Lyon, elle arrive à point nommé pour les candidats comme pour les enseignants chargés de leur présenter la Chine et ses enjeux.

Sébastien Colin, géographe et maître de conférences à l’INALCO, actuellement détaché au Centre d’études français sur la Chine contemporaine à Hong Kong, actualise ainsi le précédent numéro de la Documentation photographique publié en 2008 par Thierry Sanjuan. La proximité temporelle de ces deux publications renvoie à l’actualité foisonnante de ce pays qui ne cesse d’interroger. Candidats et enseignants disposeront ainsi d’un large volet de documents commentés pouvant servir de supports pédagogiques comme d’exemples à leurs jeunes élèves.

Avoir retenu la problématique de la puissance permet d’examiner de manière stimulante la Chine comme « une puissance mondiale, mais incomplète, en construction », cherchant ainsi à prendre une revanche sur le « siècle de la honte » (ou « siècle d’humiliation nationale ») » (p. 3). La puissance chinoise est le résultat d’une politique volontariste mise en œuvre depuis la fin des années 1970, à la suite de la décollectivitisation des terres rurales ayant permis de libérer un important réservoir de main-d’œuvre. Depuis, l’atelier du monde est devenu un grand investisseur mondial cherchant à asseoir son hégémonie par l’élaboration d’une puissance militaire (hard power) et culturelle (soft power) ; même si la Chine « souffre [encore] d’un sérieux problème d’image dans le monde occidental » (p. 7).

Exister en tant que puissance exige d’entretenir des rapports parfois très complexes avec les autres pays. Ainsi, au-delà de l’appartenance de la Chine à des grandes institutions internationales (ONU depuis 1971, FMI et Banque mondiale depuis 1980, OMC depuis 2001), ses relations avec les Etats-Unis alternent entre rivalités (stratégie du collier de perles, par exemple) et coopérations (achat de bons du Trésor américain permettant de soutenir l’économie américaine tout en accroissant la dépendance de celle-ci à la Chine). Le partenariat sino-russe (coopération militaire et économique) trouve ses limites puisque la Russie continue de vendre des armes au Vietnam et à l’Inde, deux pays avec lesquels la Chine entretient des litiges territoriaux. Ainsi, dans son espace régional, la Chine cherche à la fois à réaffirmer sa souveraineté tout en menant une politique de bon voisinage (projets de « routes de la Soie » à la fois maritimes et terrestres).

Au-delà de ces relations géopolitiques, la Chine demeure confrontée à des défis majeurs, précédemment étudiés dans la Documentation photographique conduite par Thierry Sanjuan : son modèle de croissance économique semble peu durable, les défis démographiques tiennent une place centrale (et la fin de la politique de l’enfant unique arrive trop tard pour modifier le vieillissement de la population déjà bien engagé), les tensions sociales sont permanentes et s’accompagnent de plus en plus de protestations pour dénoncer les inégalités socio-spatiales mais aussi les atteintes à l’environnement, responsables d’une dégradation des conditions de vie des urbains de la façade maritime chinoise. Ainsi, ce pays est encore loin d’être la puissance sur laquelle s’appuie une partie du scénario du film de Ridley Scot « Seul sur Mars » où la Chine apparaît comme l’allié indispensable des Etats-Unis. Toutefois, si, comme l’ont calculé les fans du roman d’Andy Weir, l’action se place en 2035 calcul basé sur l’orbite de Mars d’après [http://www.allocine.fr/article/fichearticle_gen_carticle=18646794.html->http://www.allocine.fr/article/fichearticle_gen_carticle=18646794.html], cela laisse encore un peu de temps aux Chinois d’affirmer leur puissance, y compris spatiale !

Catherine Didier-Fèvre © Les Clionautes