Présentation de l’œuvre
L’auteur
Jean-Paul Bourgier est originaire de Saint-Etienne. Docteur en géographie et professeur agrégé d’histoire-géo dans les lycées, il entame une carrière d’écrivain en combinant ses compétences d’historien et sa passion pour le cyclisme. Cours Fauriel, lieu mythique du Tour de France à Saint-Etienne de 2002, suivi de Conditions climatiques et compétitions cyclistes, atmosphère de courses en 2007, confirment son domaine de prédilection.
Lorsqu’il écrit Le Tour de France 1914, il traite d’un sujet qu’il maitrise et auquel il est profondément attaché. Il en est spécialiste et n’hésite pas à se déplacer sur les lieux qu’il étudie afin de se garantir une fiabilité maximale.
L’ouvrage
Titre: Le Tour de France 1914
Sous-titre: « De la fleur au guidon à la baïonnette au canon »
Date de publication: octobre 2010
Éditions Le Pas d’Oiseau
Préface de Jean Bobet (ancien cycliste reconverti dans le journalisme sportif)
Annexes:
-Liste des participants au tour de France 1914
-Résultats, classement général
-Coureurs ayant participé au Tour de France de 1903 à 1914 et morts au combat
Le livre est illustré d’un dossier de photographies comportant 8 pages.
Chapitres
I. Les promesses du printemps et du début de l’été ……………………………………………………13
1) Une très forte rivalité franco-belge …………………………………………………….15
-Les coureurs belges en première ligne
-Une nouvelle génération dans le peloton français
-Un cyclisme italien à la recherche de son premier campionissimo
-Précision suisse et coureurs des Antipodes
2) De L’agitation parisienne aux préparatifs en Serbie ……………………………………………………22
-Agitation et frivolité parisiennes, une « Madelon » sans succès!
-Bosniaques déterminés
3) Préparer le Tour de France, le feuilleton cycliste de l’année ………………………………………………………..27
-Le tour de la France du traité de Francfort
-Equipiers et coureurs « isolés », un prestigieux peloton
II. Suspense sur le Tour de France, hésitations des ambassades …………………………………..39
1) De Paris à Perpignan, le Tour s’est-il joué dans les Pyrénées ? …………………………………………………41
-28 juin, Paris-Le Havre: le hasard est plus à Sarajevo qu’en Normandie
-30 juin, du Havre à Cherbourg, nouvelle victoire belge et rencontre imprévue
-2 juillet, à Brest, sprint houleux et serré; à Paris, lucidité de Clémenceau
-4 juillet, Brest-La Rochelle: de la route du Tour aux puissances Européennes en tous genres
-6 juillet, La Rochelle-Bayonne: monotonie landaise, engagement du Kaiser Guillaume II auprès de l’Autriche-Hongrie
-8 juillet, Bayonne-Luchon: fantastique bataille favorable à Thys, agitation belliqueuse à Vienne et Budapest
-10 juillet, Luchon-Perpignan: Sprint du « gars Jean » difficultés de Lapize et Petit-Breton
2) De Perpignan à Belfort, tensions dans le peloton et dans les chancelleries ……………………………..65
-12 juillet, Perpignan-Marseille: Octave Lapize et Victor Hugo honorés
-14 juillet, Marseille-Nice: fête nationale mais victoire belge; Poincaré prêt à partir en Russie
-16 juillet, Nice-Grenoble: triomphe et discorde dans l’équipe Peugeot, fin des fenaisons en haut-Forez
-18 juillet, Grenoble-Genève: trois G, Galibier, Garrigou et Gino; un ultimatum se prépare
-20 juillet, Genève-Belfort: Henriette Caillaux éclipse Henri Pélissier. Chaleur en « petite Sibérie » jurassienne.
3) De Belfort à Paris : Philippe Thys vainqueur de justesse, la crise internationale éclate au grand jour …………………….84
-22 juillet, Belfort-Longwy: la paix des braves pour François Faber, ultimatum autrichien dans un jour de repos
-24 juillet, Longwy-Dunkerque: suspens inattendu sur le Tour, crise ouverte dans les Balkans
-26 juillet, Dunkerque-Paris: Philippe Thys réalise le doublé, fête à Paris en pensant au Tour 1915
III. La baïonnette au canon …………………………………………………103
1) Ultimes sprints, tout s’accélère …………………………105
-30 juillet, « la revanche du Tour » au vélodrome Buffalo à Paris
-Rentrer en France: un premier parcours du combattant pour certains cyclistes
2) La France en guerre, la mobilisation de toutes les énergies ……………………..109
-1er Aout, tocsin, coup de clairon, stupeur et inquiétude
– « Mes p’tits gars! Mes p’tits chéris! Mes p’tits gars français! »
3) Morts au champ d’honneur ……………………………………………118
-Marcel Kerff et les Belges toujours en première ligne
-Antonin, le paysan forézien, et François, le vainqueur du Tour de France
-Avec Faber, quatorze coureurs du Tour 1914 morts au combat
-Souvenirs héroïques du passé et promesses de l’avenir
Résumé
Le livre nous offre une nouvelle approche de la Première Guerre mondiale; l’auteur choisit de mettre les conflits européens en parallèle avec l’avancée de la compétition sportive. Des nations se préparent aux conflits et alliances tandis que des coureurs de différentes nationalité luttent pour la victoire de chaque étape… Quoi de plus similaire?
A la Belle Époque, le cyclisme est l’un des sport les plus médiatiques dans l’hexagone. Il permet à des champions de plusieurs nationalité différentes de courir sous la bannière de leur firme et de leur nation. Les Français Cruperlandt, Lapize, Petit-Breton, Pélissier, Alavoine et Trousselier rivalisent avec leurs concurrents, dont les plus redoutables sont les Belges, notamment Philippe Thys.
La France, la Belgique et l’Italie sont les principales nations du cyclisme en 1914. Cependant des Suisses, des Norvégiens et même des Australiens prennent part au Tour de France.
Tandis que celui-ci prend le départ, la situation en France est préoccupante : Les élections législatives du 10 mai ne permettent pas de mettre en place un gouvernement stable ; l’Affaire Caillaux éclate, et le Président Poincaré est la cible de nombreuses critiques, notamment celles de Clemenceau. En raison de l’occupation des territoires d’Alsace-Lorraine par l’Allemagne, une organisation appelée « Lorraine sportive » a bien du mal à se maintenir, le tracé de la course est d’ailleurs significatif de la disposition géographique de la France. Au même moment, le nationaliste serbe Gavrilo Princip complote et va, sans s’y attendre, déclencher un conflit planétaire.
Alors qu’en France personne ne se soucie de l’assassinat de l’Archiduc héritier d’Autriche (mis à part Jean Jaurès et autres Clemenceau), la météo est propice pour les coureurs : la course est bien entamée, et les rebondissements peuvent se lire sur les Unes de nombreux journaux comme Sporting ou bien entendu L’Auto. Les alliances entre équipes se disputent la Une avec les alliances étatiques. Hansi, un caricaturiste alsacien pro-français, est arrêté et jugé, le terme de « conflit mondial » est pour la première fois évoqué tandis que les Français raflent une victoire aux Belges. En parallèle, le 15 juillet, la France a voté son budget pour la militarisation qui semble désormais bien nécessaire, en attendant la réponse de l’ultimatum. Le Tour de France prend alors une allure patriotique, et c’est avec fierté que les soldats français postés au frontières viennent encourager les cyclistes.
Les coureurs se muent en héros, en modèles de la jeunesse française : elle se veut tenace, forte et sans vice. Le sport devient alors quasiment un objet de propagande, en particulier dans les revues sportives, qui incitent très clairement ses lecteurs à s’engager pour défendre la France à l’image de ses athlètes. Bon nombre d’entre eux y perdront la vie, comme Lapize par exemple. Dans les tranchées, sous les uniformes, il n’existe nulle distinction de classe ou de moyens. L’athlète à la vie confortable côtoie les travailleurs de la terre aux mains éraflées : parmi ces derniers se trouve le grand-père de l’auteur.
Appréciation
L’approche originale du sujet est un point qu’il faut souligner : tout l’ouvrage est tenu à la manière d’un journal, de par ses gros titres et ses dates. D’ailleurs, les sources sont pour la plupart journalistiques. Le style d’écriture est clair et agréable à lire, allégé par de nombreuses anecdotes culturelles qui ponctuent les passages où l’information est un peu trop scolaire.
Le petit dossier de photographie permet de mettre des visages sur les noms, cependant il arrive un peu tard : petit conseil, le consulter avant d’entamer la lecture.
Enfin, l’intérêt majeur du livre est son ambigüité entre œuvre purement historique et l’hommage aux ancêtres de l’auteur, cités à maintes reprises. Il est alors intéressant de voir que cet ouvrage est à la fois une étude historique sur un sujet ordinaire traité de façon originale, et participe au devoir de mémoire national et intime de l’écrivain.