Interview de Nacima Baron-Yellès (LVMT) par Catherine Didier-Fèvre, janvier 2013.

Vous réalisez actuellement une étude sur les territoires de proximité choisis, en classe de première, comme études de cas dans le cadre de vos travaux de recherche.

– Quel rôle peuvent jouer les géographes dans l’aménagement du territoire ? et auprès de partenaires tels que la SNCF ?

Même si les filieres à l’université paraissent disjointes, je crois que les geographes travaillent de manière générale avec l’Etat sur des questions d’aménagement depuis l’Ancien Regime au moins. Plus près de nous, les développements techniques de la production cartographique, dans lesquels se sont illustrés de nombreux geographes, ont été mis à profit par les acteurs de l’amenagement au niveau des départements, des régions ou de la datar.
Vis à vis de la SNCF, les géographes ont leur mot à dire sur le devenir des réseaux ferrés et sur leur adéquation ou non avec les besoins de mobilité des Francais.

– En quoi la problématique des mobilités peut-elle permettre d’éclairer les questions d’aménagement du territoire ?

La question des mobilités prend réellement de l’ampleur dans la pensée aménagiste parce que les decideurs, pour la plupart, ont pris conscience du fait qu’on ne peut organiser les territoires sans comprendre, d’abord, les pratiques des individus et des ménages. Par exemple, le desserrement residentiel et l’installation dans un pavillon périurbain est un choix de mobilité tres structurant pour les politiques publiques, car il crée des besoins d’équipement comme le tramway pour relier les zones d emploi.

Vous avez participé à la refonte des programmes de lycée (2009-2012). Ceux-ci sont très décriés, en histoire notamment.

– Quelle a été la logique qui a conduit le groupe d’experts, auquel vous avez participé, à privilégier l’échelle locale dans les programmes de première, notamment (même si celle-ci a été introduite en parallèle en classe de sixième avec le thème : Mon espace proche) ?

L’espace local n’a pas été privilégié, toutes les entrées scalaires co-existent dans ce programme et l’enjeu est justement là : l’espace vécu par l’élève est une des dimensions permettant de construire une réflexion d ordre géographique, en lien avec la montée en puissance d’un autre concept, qui est l’habiter. Mais ce n’est qu’une dimension parmi d’autres.

Votre parcours de recherche est marqué par un glissement de vos thèmes de recherche de l’Espagne aux réseaux en Méditerranée occidentale.

– Pouvez-vous revenir sur ce parcours et montrer la place tenue par les différents concepts employés dans votre recherche ?

Je n’ai pas opéré de glissement et je reste tres mobilisée intellectuellement sur l’Espagne : je prepare un ouvrage sur les effets de la crise sur les territoires et la société dans ce pays. La notion de crise est multiforme et se lit aussi dans les questions liées aux transports et aux reseaux. En effet, là-bas comme ici bientot, la restriction des budgets publics oblige à être très sélectif dans les grands choix d’investissement et a opéré des arbitrages quant à l’utilité de telle ou telle politique, tel ou tel équipement au nom de l’intérêt général. Les geographes ont toute leur place dans ces debats.