Ce cliché a été pris le 17 juillet 2017 dans la ville de Tananarive, en plein centre de Madagascar. Cette île est située au sud-est du continent africain, au cœur de l’océan Indien. Tananarive a conservé son statut de capitale depuis le temps où elle était une colonie française, depuis 1885, bien qu’elle jouisse de son indépendance depuis 1960. La toponymie même de la ville révèle une partie de son intérêt géographique, Tananarive signifiant « La ville des 1000 », sans doute en référence aux multiples collines qui constituent son impressionnant relief.

Cette photographie est celle d’un paysage verdoyant. En effet, les deux tiers de la photographie sont constitués de la végétation endémique de Madagascar : les rizières et les champs de taro. Les plantations sont délimitées entre elles par des buttes de terre et s’étendent ainsi à perte de vue. A l ‘extrémité droite, deux maisons : une vieille bâtisse en pierre d’apparence rustique donnant directement sur les champs et une seconde, construite en briques, surélevée et protégée par des murs délimitant un jardin à la végétation luxuriante. Malgré l’étendue du paysage champêtre, le regard se porte inévitablement sur l’arrière-plan où une épaisse fumée grisâtre s’échappe de la terre et enfume le village avoisinant, composé de maisons blanches, identiques les unes aux autres, construites sur le flanc d’une colline rouge.

Cette image possède de multiples intérêts géographiques que l’analyse permet de déceler.

D’abord en terme de relief. Dans cette vaste île, d’une superficie proche de 600 000 km², collines et plaines se côtoient. Bien que ces dernières ne représentent que 5% de la surface territoriale, elles constituent un espace agricole capital pour l’économie du pays.
Ensuite, derrière son apparente simplicité, cette photographie montre en réalité les trois visages de Madagascar :
L’agriculture explique 20% du PIB malagache. Il est étonnant de constater la présence d’un paysage rural en pleine capitale, lieu qui, de nos jours, regroupe essentiellement des activités secondaires et tertiaires. Cela révèle l’importance de l’agriculture vivrière dans le pays. En effet, elle emploie 80 % de la population active. Malgré cela, la faiblesse des infrastructures et le manque de moyens financiers conduisent à une instabilité alimentaire.
La faim et la misère sont par conséquent omniprésentes sur le territoire. Derrière le fumerolle de la photographie se cache Andralanitra, la plus grande décharge à ciel ouvert de Madagascar. Étendue sur plus de 20 hectares, elle est l’unique moyen de survie de milliers de Malgaches grâce à ce qu’ils y dénichent, tant à manger qu’à vendre. Cependant, la population n’est pas impassible et certains parviennent à faire bouger les lignes dans une certaine mesure.

Un certain dynamisme est visible dans certaines zones géographiques. Le village d’Akamasoa en fait partie. Présent en arrière plan du cliché, il a été bâti en 1989 par des habitants de la décharge sur la base de la volonté et de la solidarité. Il représente aujourd’hui un idéal d’extraction de la misère et d’ascension sociale voyant le jour dans d’autres villes de la Grande Ile. En raison des faibles moyens financiers et du manque de qualifications, cela reste cependant difficile à entreprendre à grande échelle.

Enfin, cette photo rend visible la fracture sociale par la présence d’inégalités entre les habitants. Bien qu’il n’y ait pas de classe moyenne à Madagascar, le niveau de vie n’est pas le même partout. Cela est visible notamment par les habitations. Ici, la maison orange sur la droite de la photo surplombe la première, au confort sans doute beaucoup plus élémentaire. Bâtir en hauteur est une marque de supériorité économique comme social. Elle a de surcroît les moyens de se protéger en érigeant des murs. Entre le village et la décharge, le niveau de vie est tout aussi contrasté, au sein d’une zone géographique très limitée.

Faire parler cette image m’a permis de rendre compte de nombreuses informations géographiques essentielles qu’elle renferme. Ainsi, cet échantillon géographique de la capitale est représentatif de l’organisation spatiale et sociale du pays tout entier.

Blandine Gavault, HK 1718 Sainte-Marie-Lyon