Cette fiche de lecture développe le chapitre 7 du manuel de concours Armand Colin sur la question du travail en Europe occidentale. Dans ce chapitre, Sandrine Kott s’intéresse au travail en Allemagne entre 1830 et 1939. Cette fiche peut être utilement accompagnée d’une histoire de l’Allemagne: 

Raymond Poidevin et Sylvain Schirmann, Histoire de l’Allemagne, Hatier, 1995.

Johann Chapoutot, Histoire de l’Allemagne (1906 à nos jours), PUF, Que sais-je ?, 2014.

 

I-1830-1871 : les mondes de l’atelier

Entrée plus tardive de l’Allemagne dans l’ère industrielle.
Il existe une grande porosité entre les différentes formes du travail. Mais par commodité les mondes du travail sont ici différenciés.
La ligne conductrice de cette partie est l’émergence du travailleur comme figure sociale et politique.
Ce sont les protestations, révoltes et revendications communes qui permettent de distinguer les travailleurs des autres groupes sociaux auxquels ils étaient liés.

Historiographie :
o J. KOCKA, Arbeiterleben und Arbeiterkultur, 2015.
o J. SCHMIDT, Brüder, Bürger und Genossen, 2018.

I-1-Les trois mondes du travail

Artisanat urbain en Allemagne

Grande diversité de métiers et de situations. 46 % des actifs du secondaire jusqu’en 1870. A l’aube du XIXème siècle : 10% de la population urbaine sont des artisans.

Jusqu’en 1860, l’artisanat est encore largement fondé sur des bases traditionnelles au sein de corporations obligatoires. Si les édits de 1807 et 1811 introduits par l’occupant français permettent le développement de nouvelles formes d’activités, il faut attendre 1867/1869 pour que l’Allemagne entre dans l’ère de la libre entreprise (1867 : constitution de la Confédération de l’Allemagne du Nord ; 1869 adoption du code des métiers – fin des corporations obligatoires). Cependant, les corporations sont maintenues notamment dans le monde urbain.

A partir de 1830, le nombre des artisans croît plus vite que la pop. totale. Ce qui entraîne une hausse du nombre de compagnons et donc les chances de devenir maîtres s’affaiblissent.
– Forte paupérisation dans le premier 1/3 du XIXème siècle. Mais les situations sont diverses :
Tailleurs et bottiers souffrent de la concurrence de l’industrie textile et du cuir. Ils sont dans l’incapacité de s’acquitter des droits de bourgeoisie qui donne accès la vie politique.
Certains métiers sont plus prospères : maçons, charpentiers, artisans de l’alimentation tirent profit de l’urbanisation.
A partir de 1850, le mode de vie « traditionnel », où le compagnon habitait chez le maître avec les avantages en nature prévus par l’organisation de la corporation, tend à disparaître au profit de rapports salariaux classiques (salaire souvent à la tâche) qui se substituent à la communauté de l’atelier.

Dans le même temps, les apprentis et compagnons développent des sociabilités et organisations spécifiques, sous forme d’associations libres qui constituent une sorte de transition vers le développement du syndicalisme à partir des années 1860.
– Temps d’apprentissage à tendance à s’allonger : 10 ans en moyenne + célibat des apprentis.
– Au cœur des pratiques associatives se trouvent les caisses de secours mutuels :
Pour les indemnités de voyage, de chômage, pour un enterrement digne, couverture maladie.
Caisses de secours mutuels sont encouragés par les communes qui espèrent ainsi limiter le nombre de ceux qui tombent à la charge du bureau des pauvres.
Caisses de secours sont aussi des lieux de sociabilités : multiples rencontres lors des funérailles, réunions au cabaret – occasion de boire au frais des caisses, lieux de discussions, d’organisations politiques voire de caisses de grèves en cas de conflit.

Exemple :

En 1875, en Prusse, sur 4763 caisses recensées, 700 regroupent des artisans et des ouvriers de la fabrique; témoin de la fluidité des conditions à cette période et constitution d’un groupe social spécifique au-delà des différences de statuts

C’est dans ce contexte que les caisses constituent le noyau de base du développement du syndicalisme durant les années 1860 et 1870.

Autre moment fort de constitution de cette sociabilité compagnonnique : le voyage d’apprentissage.
– Voyage de 3 ans : l’obligation disparaît mais la réalité fait qu’il continue permettant de dissimuler une période de chômage.
– Le compagnon sort des frontières de l’État où il a fait son apprentissage et fait de nouvelles rencontres et apprend de nouveaux savoir-faire.
– Les auberges sont des lieux de sociabilités importantes : rencontres, discussions sur les maîtres, sur les questions sociales et salariales, coalitions et préparation des grèves qui émaillent la vie des corporations avant la révolution de 1848.
Mobilités multiples et remise en cause de la verticalité des relations entre maîtres et compagnons au sein de l’artisanat.

L’ouvrier à domicile et la proto-industrie rurale

A la différence de l’artisanat rural, il s’agit d’une activité qui alimente au-delà des besoins locaux.
De nombreux secteurs emploient une main d’œuvre paysanne pléthorique et en accroissement rapide :

Exemples :

Les Clionautes multi-écran

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