La religion romaine hors de Rome : le cas du pilier des nautes à partir du moulage du Musée Adolf Michaelis de Strasbourg (CIL XIII, 3026)
« Nous saisirions, ici même, la permanence d’une tradition cultuelle et architecturale celtique, sous la façade romanisée. L’ensemble formé par le Pilier des Nautes et de l’Arc du Tricéphale prolongerait d’anciens groupements, remontant à l’époque de l’indépendance1. » L’hypothèse formulée par J.-J. Hatt au milieu du XXe siècle concernant le pilier des nautes témoigne d’un état de la recherche et d’une idée persistante dans le champ des études sur ma religion en Gaule romaine et, plus généralement, dans les provinces occidentales de l’Empire. C’est sans doute parce que depuis C. Jullian2 et J. Toutain3, il est commun d’envisager une forme de pérennité des cultes et des divinités entre la Tène moyenne-La Tène finale (le second Âge du fer précédant la conquête romaine 250-30 av. n. è.) et l’époque impériale.
Cette hypothèse s’est progressivement constituée dans un idéal romantique dont les premières traces peuvent être trouvées chez les antiquaires comme le comte de Caylus au XVIIIe siècle qui commente déjà le pilier des nautes. Cependant, les travaux plus récents, comme ceux J. Scheid4 et W. Van Andringa5 ont bien montré que les divinités anciennes changent complètement d’identité avec l’interpretatio romana et que rares sont les dieux indigènes, souvent topiques, à continuer de recevoir un culte. Le pilier des nautes n’échappe pas à cette règle, puisque ce monument construit sous l’empereur Tibère (14-37) par le collège des nautes de Lutèce (Paris), ne peut être conçu hors du cadre des institutions de la religion romaine.
Ce pilier, retrouvé en quatre fragments sous le chœur de la cathédrale Notre-Dame-de-Paris en 1711, comporte des représentations de divinités et de membres de la corporation, ainsi qu’une inscription. L’ensemble présente à la fois des difficultés de restitution, mais aussi de contextualisation, puisque la localisation originelle du pilier est inconnue.
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