Sécuriser les voies maritimes : vaste programme aujourd’hui pour les marines occidentales en Mer Rouge, confrontées aux attaques Houthis.
La question taraude également, dans un autre registre, la marine russe qui désirait (désire toujours ?) faire de la Mer Noire un lac, privant ainsi l’Ukraine de toute façade maritime.
L’actualité brûlante de Gaza, concentrée sur l’offensive potentielle contre la ville de Rafahhttps://www.lexpress.fr/monde/proche-moyen-orient/gaza-israel-prepare-une-offensive-terrestre-a-rafah-44B4X6DJXJEUNG7TWRLUB7KM6M/, le retrait ukrainien de la ville d’Avdiivka https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/manifestations-en-ukraine/guerre-en-ukraine-l-armee-ukrainienne-annonce-son-retrait-d-avdiivka-apres-des-mois-de-combats-dans-cette-ville-de-l-est-du-pays_6371668.html ont semblé mettre sur un plan secondaire les opérations maritimes, comme si la voie terrestre restait le cœur de décision de ces deux guerres.
Si la dimension maritime des opérations militaires israéliennes à Gaza est largement secondaire, la menace Houthis n’étant qu’une conséquence lointaine du théâtre d’opération, la sécurisation de la Mer Noire, en revanche, est cruciale pour l’armée russe. Conserver la Crimée sans pouvoir s’appuyer sur un ravitaillement efficace par voie maritime risque en effet de poser de sérieux problèmes à l’armée russe. À portée de tir des armes ukrainiennes, le risque d’une perte potentielle de la route de Mélitopol menacerait d’isoler totalement la Crimée de la Russie. Dans ce cas de figure, seule la voie maritime permettrait de ravitailler efficacement les forces de la péninsule, dans un contexte où le pont de Kerch est aussi une cible, alimentant par ailleurs l’affaire des « Taurus » allemands.
Sécuriser les voies maritimes est une question au cœur de la pensée d’ Alfred T. Mahan et de Julian S.Corbett. Par la mise en perspective de leur pensée, il s’agira donc dans la suite de ce dossier de mesurer la pertinence de leurs analyses dans la compréhension de ce qui se joue dans les crises actuelles. La dimension maritime de ces réflexions pose en effet question lorsque l’on essaie de réfléchir aux moyens et buts engagés face aux Houthistes en Mer Rouge. Ces derniers, sans marine de guerre, parviennent à mobiliser des forces très importantes, largement supérieures d’un point de vue technologique, soulignant un pouvoir de nuisance face auquel les moyens d’actions ne semblent pas donner, à ce jour, de garanties suffisantes pour sécuriser cette artère majeure du commerce mondial.
De la même façon, l’Ukraine, avec une marine de guerre qui est largement impuissante (une confrontation directe avec son homologue russe n’a jamais été matériellement envisageable), empêche néanmoins la Mer Noire d’être un lac pour Vladimir Poutine.
Il est possible de sonder l’histoire pour trouver des traces d’approches similaires. Au IVè siècle av. notre ère déjà, la maîtrise de la Méditerranée orientale s’est davantage jouée sur terre que sur les mers. La marine la plus puissante fut réduite à l’impuissance sans avoir pu mener de véritable bataille par une approche terrestre des opérations.
Contrôler les mers : oui, mais comment ?
C’est un fait qui passe souvent sur un plan secondaire mais l’expédition d’Alexandre le Grand contre l’Empire perse (entre Mai 334 av. JC, date du débarquement en Chersonèse de Thrace, et juin 323 av. JC, date de sa mort) qui devait le mener jusqu’à l’embouchure de l’Indus, comporte une dimension maritime non négligeable.
L’expédition a ainsi commencé par un débarquement naval, entre 334 et 332. La flotte hellénique participa par la suite aux sièges victorieux de quatre ports majeurs, dont le célèbre siège de Tyr. Pourtant, on ne trouve pas trace de confrontation maritime entre les deux belligérants et ce sont bien deux batailles terrestres, le Granique en 334 av. JC et Issos en 333 av. JC, qui vont borner la prise de contrôle macédonienne de la Méditerranée orientale. L’explication se trouve chez Arrien Arrien de Nicomédie, L’anabase d’Alexandre le Grand, traduit du grec par Pierre Savinel, Les éditions de minuit, Paris, 1984.
Néanmoins, Parménion engageait vivement Alexandre à livrer une bataille navale : il espérait que les Grecs vaincraient sur mer pour de nombreuses raisons, et en particulier il cherchait à convaincre Alexandre par un présage : on avait aperçu un aigle posé sur le rivage, à la proue des vaisseaux d’Alexandre ; et, effectivement, la victoire leur apporterait de grands avantages pour l’ensemble de l’expédition, tandis qu’un échec ne serait pas de grande conséquence puisque, de toute façon, les Perses avaient la maîtrise de la mer ; il ajoutait qu’il était prêt à monter lui-même sur les navires et à partager le danger. Mais Alexandre dit que Parménion commettait une erreur de jugement et que son interprétation du présage n’était pas vraisemblable ; en effet, il n’y avait aucun bon sens à engager une bataille navale avec un petit nombre de navires contre une flotte considérablement plus nombreuse, et à opposer, à la flotte bien entraînée des Cypriotes et des Phéniciens, leur propre flotte dont personne ne s’était occupé ; il ne consentait pas à livrer aux Barbares l’expérience et la hardiesse des Macédoniens en les faisant combattre sur une surface mouvante ; en outre, une défaite navale porterait un coup considérable à leur réputation initiale dans la guerre, et en particulier les Grecs, exultant à la nouvelle de cette défaite, se révolteraient. Ayant appuyé de tels arguments sa façon de voir, il démontra qu’il n’était pas opportun de livrer un combat sur mer ; il expliquait personnellement le présage de tout autre façon : l’aigle était bien pour lui, mais il était apparu posé sur le sol ; ce qui lui semblait plutôt signifier que c’est à partir de la terre qu’il vaincrait la flotte perse. Arrien, 1, 18, 4
Source : https://www.worldhistory.org/uploads/images/336.jpg?v=1707756844
Le texte ne saurait être plus clair. Alexandre le Grand, conscient de la supériorité navale de son adversaire, lui a refusé la confrontation directe. Si le Granique lui a offert une première victoire de prestige, la bataille d’Issos fut d’une importance bien plus grande. Alors que la flotte perse de Pharnabaze reprenait Milet, accumulait les succès dans les Cyclades (Chios, Andros et Siphnos tombent ainsi dans la main de l’amiral perse), au point de menacer l’alliance grecque de dislocation, la victoire du macédonien en octobre 333 à Issos renverse totalement le sort de la campagne. Les équipages des cités chypriotes et phéniciennes se rangent petit à petit du côté du vainqueur. Darius perd alors sa puissante flotte au profit de la ligue hellénique et des Macédoniens. Cette flotte va permettre au conquérant de s’emparer de Tyr de vive force, offrant la porte de l’Égypte et permettant de marcher par la suite au cœur de la Babylonie. Non seulement la supériorité navale perse a été effacée mais, pire, elle s’est retrouvée dans les mains du conquérant macédonien!
Entre-temps, le roi d’Arados, Gérostrate, et le roi de Byblos, Enylos, ayant appris que leurs cités étaient au pouvoir d’Alexandre, quittèrent Autophradatès et son escadre, et vinrent avec leur propre flotte se ranger aux côtés d’Alexandre, ainsi que les trières de Sidon qui les accompagnaient, en sorte que c’est un renfort d’environ quatre-vingts navires phéniciens que reçut Alexandre. Dans les mêmes jours arrivèrent des trières de Rhodes, celle qu’on appelle le Vaisseau-de-garde et neuf autres avec elle, trois de Soles et de Mallos, et dix de Lycie ; un navire à cinquante rames avec, à son bord, Protéas, fils d’Andronicos, arriva de Macédoine. Peu après, les rois de Chypre aussi abordèrent à Sidon, avec environ cent vingt navires, après avoir appris la défaite de Darius à Issos, et pris de peur devant une Phénicie désormais tout entière au pouvoir d’Alexandre. Ce dernier accepta de passer l’éponge sur leur attitude antérieure, parce que c’était plus, semble-t-il, par contrainte que par libre choix qu’ils s’étaient rangés aux côtés des Perses pour la marine.
Quand les machines de guerre commandées par Alexandre eurent été assemblées, les navires préparés pour l’attaque et pour affronter l’épreuve d’une bataille navale, Alexandre, avec certains escadrons de cavalerie, les hypaspistes, les Agrianes et les archers, marcha sur l’Arabie, vers la montagne qu’on appelle l’Anti-Liban. Là, après avoir anéanti certaines places par la violence, et en avoir amené d’autres à composition, en dix jours il fut de retour à Sidon, où il trouva Cléandre, fils de Polémo-crate, qui arrivait du Péloponnèse, avec environ quatre mille mercenaires grecs.
Quand sa flotte eut été organisée, il fit embarquer sur le pont des navires autant d’hypaspistes qu’il lui semblait utile pour l’action, au cas où la bataille navale ne consisterait pas tant à percer la ligne des vaisseaux ennemis qu’à combattre corps à corps ; il leva l’ancre et, de Sidon, s’avança par mer contre Tyr, sa flotte en ordre de bataille ; lui-même était à l’aile droite, celle qui s’étendait du côté de la haute mer, et avec lui les rois de Chypre et ceux de Phénicie, sauf Pnytagore, lequel, avec Cratère, tenait l’aile gauche de l’ensemble de la ligne. Les Tyriens avaient d’abord pris la décision de livrer une bataille navale si Alexandre les attaquait par mer : mais, apercevant cette multitude de navires à laquelle ils ne s’attendaient absolument pas (car ils n’avaient pas été informés du fait qu’Alexandre disposait de la totalité des navires des Cypriotes et des Phéniciens), et comme, de plus, la flotte s’avançait à l’attaque dans un ordre impeccable (peu avant de venir au contact de la ville, les navires qui étaient avec Alexandre encore en pleine mer, s’étaient immobilisés, pour voir si, par hasard, ils provoqueraient les Tyriens au combat naval ; mais comme ils ne s’étaient pas portés en pleine mer à leur rencontre, toujours dans la même formation, ils avaient repris leur marche dans un grand bruit de rames), les Tyriens donc, à ce spectacle, renoncèrent au combat naval et entassèrent dans les entrées de leurs ports tout ce qu’elles pouvaient contenir de trières pour barrer tout accès aux navires attaquants, et empêcher la flotte adverse de jeter l’ancre dans un des ports. Arrien, II, 20, 6
Leçons macédoniennes et perses pour Russes et Ukrainiens
Proposer un parallèle entre les opérations macédoniennes du IVè siècle avant notre ère et l’invasion généralisée de l’Ukraine par Vladimir Poutine depuis février 2022 peut légitimement interroger. Les comparaisons historiques sont intrinsèquement imparfaites et il faut savoir raison garder. Les conditions politiques, économiques, sociales et surtout technologiques qui existaient dans le passé sont très largement différentes ; d’un côté des trirèmes, de l’autre des drones navals Magura V5, le parallèle semble peu efficient. Cependant, nous pouvons extraire des constats simples et examiner des éléments, des approches singulières dans l’histoire pour jeter les bases de réflexions adaptées à nos réalités.
Ce qui frappe en premier lieu, c’est l’incapacité de deux puissances navales reconnues, l’Empire perse et la Russie en Mer Noire, à en tirer pleinement avantage face à leurs adversaires respectifs. Si les Perses ont sérieusement menacé les arrières macédoniens jusqu’en Mer Égée avant la bataille d’Issos, si la flotte russe en Mer Noire a semblé au début de la guerre pouvoir servir de point d’appui majeur pour une conquête d’Odessa, les choses se sont vite gâtées. La victoire sur terre des troupes d’Alexandre le Grand lui a offert la puissance navale qu’il n’aurait pu espérer avoir en affrontant directement les navires de Pharnabaze.
De la même façon, la flotte ukrainienne a été incapable d’affronter directement le Moskva et sa suite. Pour rappel, le 24 février 2022, quelques heures après l’invasion, les forces ukrainiennes ont sabordé leur unique frégate, le Hetman Sahaidachny, qui était en réparation au chantier naval de Mykolaïv https://www.courrierinternational.com/article/resistance-la-marine-ukrainienne-saborde-son-unique-fregate. L’épisode de l’U311 Cherkasy avait dès 2014 posé les bases du problème pour des Ukrainiens, quant à leur impuissance à affronter une marine de haute mer du fort au fortÀ propos de cet épisode je renvoie au film U 311 Cherkasy, analysé sur cliociné au printemps 2022 : https://cinehig.clionautes.org/cherkasy.html.
Pourtant, l’Ukraine a multiplié depuis les succès, grâce à l’aide des renseignements et des armes occidentales, mais aussi grâce à leur propre production de drones suicides, au point de repousser la flotte russe dans ses ports les plus éloignés et de rendre la Mer Noire trop dangereuse pour les Russes pour espérer pouvoir en revendiquer le contrôlePour explorer plus avant les questions des limites actuelles de la marine russe, voir Brève Marine N°282 – La flotte russe, une marine enclavée ?.
Destruction du navire amiral de la flotte, le Moskova, 13-14 avril 2022
C’est d’ailleurs l’analyse d’ Arnaud Peyronnet, chercheur associé à la FMES qui publiait il y a peuVers une neutralisation de la flotte russe de la mer Noire ?, in APRÈS L’UKRAINE, GAZA, Perspectives stratégiques 2023-2 :
« En raison de l’attrition continue de ses moyens, la flotte russe de la mer Noire n’a plus les moyens d’imposer un blocus contraignant qui nécessiterait une permanence à la mer de nombreuses unités navales. Le déploiement de bâtiments dédiés au contrôle de ce blocus exposerait davantage la flotte russe aux représailles ukrainiennes via ses missiles côtiers et ses drones. La Russie ne peut donc que chercher à dissuader les navires commerciaux de se rendre en Ukraine, notamment par un discours très agressif, mais elle n’a plus les moyens de contrôler l’application d’un quelconque blocus. »
Dans les deux cas, la terre semble l’avoir emporté sur la mer, la puissance navale ayant été contournée et rendue totalement impuissante. La victoire macédonienne a clairement été facilitée par les erreurs perses (un débarquement des Perses sur les côtes grecques, tandis que l’armée d’Alexandre s’enfonçait en Anatolie, aurait ainsi par exemple largement rebattu les cartes) et les succès ukrainiens doivent beaucoup à l’aide occidentale. Pour frapper le Moskova ou des cibles dans les ports russes, encore faut-il disposer des renseignements, des moyens de guerre électronique et des missiles adaptésVoir l’étude fort stimulante sur le site Foreign Affairs, en date du 8 février dernier : https://www.foreignaffairs.com/ukraine/ukraines-victory-sea.
Maitriser la mer, un pas vers la victoire, mais seulement un pas
L’impact sur la guerre, dans les deux cas, est important, même s’il n’est pas totalement décisif. La perte de la maîtrise maritime par la Perse et la Russie ne signifie pas la défaite dans la guerre. Darius III peut opposer à Alexandre, en octobre 331 av à Gaugamèles, une armée encore plus puissante que celle vaincue à Issos. De son côté, si l’Ukraine a été en mesure de redistribuer ses forces en laissant sur les côtes des milices, la crainte d’un débarquement ayant été repoussée sine die, c’est bien l’armée russe qui aujourd’hui engrange les succès. Ces derniers sont extrêmement coûteuxVoir par exemple le cas de la bataille d’Avdiivka ; Institut for the study of war, bilan de février 2024 : https://www.understandingwar.org/backgrounder/russian-offensive-campaign-assessment-february-18-2024, ils n’en restent pas moins des succès et, à ce jour, l’armée ukrainienne semble en fort mauvaise posture sur de nombreux endroits du front.
En coulant des navires majeurs, les Ukrainiens ont porté des coups au moral russe, relevant par la même occasion le leur. Ce sont aussi de formidables vecteurs de propagande à destination d’une population qui souffre de la guerre. Mais ces victoires restent ponctuelles et ne sont pas en mesure de mener à une victoire politique définitive.
D’ailleurs, la Russie dispose encore de sous-marins, contre lesquels les Ukrainiens auraient bien des difficultés à s’opposer. Il reste donc une possibilité pour Moscou de bloquer radicalement les exportations de céréales par voie maritimePour un plus large exposé de la question des céréales voir « Le blé, denrée incontournable des stratégies de puissance alimentaire« , extrait des Grands Dossiers de Diplomatie, été 2023
, une carte importante à considérer lorsqu’il sera temps de négocier la paixLa question aéronavale russe vient de faire l’objet d’un très bon article de Benjamin Gravisse, dans la non moins excellente revue DSI, hors-série 94 « Porte-avions et guerre aéronavale ».
Quelles leçons peut-on retenir à ce stade ? La maitrise navale reposant sur une flotte de combat puissante, peut tout à fait être annihilée, ou à tout le moins, largement compensée par une approche indirecte reposant sur la maîtrise terrestre. La maîtrise navale peut assurément apporter beaucoup, démultiplier la puissance, mais reste soumise dans ces deux cas de figure à l’emprise terrestre. Et nous avons encore à apprendre de campagnes antiques… Comme le soulignait déjà Mahan en 1890 dans l’introduction de Influence of Sea Power Upon History, 1660-1783 :
L’histoire de la puissance maritime est en grande partie, bien que pas exclusivement, un récit de compétitions entre nations, de rivalités mutuelles, de violences souvent aboutissant à la guerre. L’influence profonde du commerce maritime sur la richesse et la puissance des pays était clairement perceptible bien avant que les véritables principes qui régissaient sa croissance et sa prospérité ne soient découverts. Pour assurer à son propre peuple une part disproportionnée de ces bénéfices, tous les efforts étaient déployés pour exclure les autres, soit par les méthodes législatives pacifiques du monopole ou des réglementations prohibitives, soit, lorsque celles-ci échouaient, par la violence directe. Le choc des intérêts, les sentiments de colère suscités par les tentatives conflictuelles visant ainsi à s’approprier la plus grande part, voire la totalité, des avantages du commerce et des régions commerciales éloignées et non colonisées, ont conduit à des guerres. D’autre part, les guerres découlant d’autres causes ont été largement modifiées dans leur déroulement et leur issue par le contrôle de la mer. Par conséquent, l’histoire de la puissance maritime, tout en englobant dans son ampleur toutes les choses qui tendent à rendre un peuple grand sur la mer ou près de la mer, est largement une histoire militaire ; et c’est sous cet aspect qu’elle sera principalement, bien que non exclusivement, envisagée dans les pages suivantes.
Une étude de l’histoire militaire du passé, telle que celle-ci, est recommandée par de grands chefs militaires comme essentielle pour avoir des idées correctes et pour la conduite habile de la guerre à l’avenir. Napoléon cite parmi les campagnes à étudier par le soldat en herbe celles d’Alexandre, d’Hannibal et de César, à qui la poudre à canon était inconnue; et il existe un accord substantiel parmi les écrivains professionnels selon lequel, bien que de nombreuses conditions de la guerre varient d’une époque à l’autre avec les progrès des armes, il existe certains enseignements dans l’école de l’histoire qui restent constants, et étant donc d’application universelle, peuvent être élevés au rang de principes généraux. Pour la même raison, l’étude de l’histoire maritime du passé sera trouvée instructive, par son illustration des principes généraux de la guerre maritime, malgré les grands changements survenus dans les armes navales en raison des avancées scientifiques du demi-siècle passé et de l’introduction de la vapeur comme force motriceAlfred Thayer Mahan, Influence of Sea Power Upon History, 1660-1783, Pantianos Classics, 2016 .
La maitrise des espaces maritimes ; les regards de Mahan et Corbett
Fondamentalement, les logiques qui conduisent les Occidentaux à user de la force contre les Houthis ne semblent pas souffrir de contestation quant aux buts recherchés. Nombreuses sont les analyses qui démontrent le poids tout à fait central des espaces maritimes dans nos économies globalisées. L’opération « Prosperity Guardian » est ainsi une dénomination sans équivoque quant au caractère décisif de cette artère économique qu’est la Mer Rouge.Voir l’excellent article de Clara Loïzzo, disponible sur Geoconfluence« La crise en mer Rouge, révélatrice de la vulnérabilité des grandes routes maritimes mondiales »
De façon plus globale, bien au-delà de la seule Mer Rouge, ce sont bien toutes les mers et océans qui sont aujourd’hui au cœur d’une compétition pour leur maîtriseVoir The Economist : « Welcome to the new era of global sea power ».
Qu’en disaient, voilà plus d’un siècle, Mahan et Corbett ?
Je propose une nouvelle fois de citer longuement les auteurs. Concernant Mahan, il s’agit d’une traduction personnelle. Quant à Corbett, je m’appuie sur celle publiée dans la Bibliothèque stratégique, Economica, ISC, Paris, 1993, déjà exploitée dans le précédent article.
Mahan et la construction de la victoire de Rome sur Carthage
À travers une longue introduction, Mahan pose les bases de sa réflexion en mettant en perspective diverses campagnes militaires, essentiellement de l’époque moderne entre la France et l’Angleterre, mais aussi en remontant à l’antiquité. La confrontation en Rome et Carthage est l’occasion d’une analyse particulièrement riche, ce qu’il pose en préface ainsi :
Une illustration curieuse de cette tendance à négliger l’impact de la puissance maritime sur les événements peut être tirée de deux écrivains de cette nation anglaise qui, plus que toute autre, doit sa grandeur à la mer. « Deux fois », dit Arnold dans son Histoire de Rome, « On a été témoin de la lutte du génie individuel le plus élevé contre les ressources et les institutions d’une grande nation, et dans les deux cas, la nation a été victorieuse. Pendant dix-sept ans, Hannibal a lutté contre Rome, pendant seize ans, Napoléon a lutté contre l’Angleterre ; les efforts du premier se sont terminés à Zama, ceux du second à Waterloo. » Sir Edward Creasy, citant cela, ajoute : « Un point, cependant, de la similitude entre les deux guerres n’a guère été suffisamment souligné ; c’est le remarquable parallèle entre le général romain qui a finalement vaincu le grand Carthaginois et le général anglais qui a infligé la dernière défaite mortelle à l’empereur français. Scipion et Wellington ont tous deux occupé pendant de nombreuses années des commandements de grande importance, mais éloignés des principaux théâtres de guerre. Le même pays a été le théâtre de la carrière militaire principale de chacun. C’est en Espagne que Scipion, comme Wellington, a successivement rencontré et vaincu presque tous les généraux subordonnés de l’ennemi avant d’être opposé au champion et conquérant principal lui-même. Scipion et Wellington ont tous deux restauré la confiance de leurs compatriotes en les armes lorsque celle-ci a été ébranlée par une série de revers, et chacun d’eux a conclu une longue et périlleuse guerre par une défaite complète et écrasante du leader choisi et des vétérans choisis de l’ennemi. »
Aucun de ces Anglais ne mentionne la coïncidence encore plus frappante selon laquelle, dans les deux cas, la maîtrise de la mer reposait avec le vainqueur. Le contrôle romain de l’eau a contraint Hannibal à cette longue et périlleuse marche à travers la Gaule où plus de la moitié de ses troupes vétérantes se sont épuisées ; cela a permis au plus jeune Scipion, tout en envoyant son armée du Rhône en Espagne, d’intercepter les communications d’Hannibal, de revenir en personne et de faire face à l’envahisseur à la Trebbia. Tout au long de la guerre, les légions passaient par voie navigable, indemnes et non fatiguées, entre l’Espagne, qui était la base d’Hannibal, et l’Italie, tandis que l’issue de la bataille décisive du Métaure, reposant comme elle le faisait sur la position intérieure des armées romaines par rapport aux forces d’Hasdrubal et d’Hannibal, était finalement due au fait que le frère cadet ne pouvait pas amener ses renforts secourables par la mer, mais seulement par la route terrestre à travers la Gaule. Ainsi, au moment critique, les deux armées carthaginoises étaient séparées par la longueur de l’Italie, et l’une d’elles fut détruite par l’action combinée des généraux romains.
La démonstration de Mahan explore en profondeur les mécanismes qui structurent la Seconde guerre punique (218 – 202 av). La supériorité navale des Romains a poussé Hannibal, ne disposant point d’une flotte suffisante en Espagne pour affronter son homologue, à effectuer ce vaste mouvement par voie terrestre qui vit des éléphants traverser les Alpes.
Il est certain cependant que sa flotte sur la côte espagnole n’était pas assez forte pour rivaliser avec celle de Rome. Si elle l’avait été, il aurait peut-être suivi la route qu’il a réellement empruntée, pour des raisons qui pesaient sur lui ; mais s’il était passé par la mer, il n’aurait pas perdu trente-trois mille des soixante mille soldats vétérans avec lesquels il était parti. Pendant que Hannibal effectuait cette marche dangereuse, les Romains envoyaient en Espagne, sous les deux aînés Scipions, une partie de leur flotte, transportant une armée consulaire. Celle-ci effectua le voyage sans perte sérieuse, et l’armée s’installa avec succès au nord de l’Èbre, sur la ligne de communications d’Hannibal. En même temps, un autre escadron, avec une armée commandée par l’autre consul, fut envoyé en Sicile. Les deux ensembles comptaient deux cent vingt navires. À leurs postes respectifs, chacun rencontra et vainquit un escadron carthaginois avec une facilité qui peut être déduite de la légèreté avec laquelle les actions sont mentionnées, et qui indique la supériorité effective de la flotte romaine.
Contrôler l’espace maritime s’avère ici décisif dans la logique de Mahan ; Rome a pu menacer les arrières carthaginois, Hannibal a perdu des forces vives dans une course dangereuse. Par la suite, la puissance navale romaine, ou du moins l’impuissance carthaginoise, a directement impacté les opérations, en compliquant très fortement à la fois la coordination des efforts des alliances militaires et politiques, mais aussi et surtout le ravitaillement des armées carthaginoises.
Après la deuxième année, la guerre prit la forme suivante : Hannibal, entré en Italie par le nord, après une série de succès, avait contourné Rome vers le sud et s’était installé dans le sud de l’Italie, vivant du pays, une condition qui tendait à aliéner la population, et était particulièrement précaire lorsqu’elle était en contact avec le puissant système politique et militaire de contrôle que Rome y avait établi. Il lui était donc dès le départ impératif d’établir, entre lui et une base fiable, ce flux de fournitures et de renforts qui, en termes de guerre moderne, est appelé « communications ». Il y avait trois régions amies qui pouvaient, chacune ou toutes, servir de base : Carthage elle-même, la Macédoine et l’Espagne. Avec les deux premières, la communication ne pouvait se faire que par mer. L’Espagne, où se trouvait son soutien le plus solide, pouvait être atteinte par voie terrestre et maritime, sauf si un ennemi en bloquait le passage ; mais la route maritime était plus courte et plus facile. Au cours des premières années de la guerre, Rome, par sa puissance maritime, contrôlait absolument le bassin entre l’Italie, la Sicile et l’Espagne, connu sous le nom de mers tyrrhénienne et sardiniennes. La côte, de l’Èbre au Tibre, lui était majoritairement favorable. Dans la quatrième année, après la bataille de Cannes, Syracuse abandonna l’alliance romaine, la révolte s’étendit à travers la Sicile, et la Macédoine entra également dans une ligue offensive avec Hannibal. Ces changements ont étendu les opérations nécessaires de la flotte romaine et ont mis sa force à rude épreuve. Quelle disposition en a été faite, et comment a-t-elle par la suite influencé la lutte ?
Les indications sont claires : Rome n’a jamais cessé de contrôler la mer Tyrrhénienne, car ses escadrons passaient sans encombre de l’Italie à l’Espagne. Sur la côte espagnole également, elle avait un pouvoir total jusqu’à ce que le jeune Scipion décide de mettre au repos sa flotte. Dans l’Adriatique, un escadron et une base navale furent établis à Brindisi pour contrer la Macédoine, qui accomplirent si bien leur tâche qu’aucun soldat des phalanges n’a jamais mis le pied en Italie. « Le manque d’une flotte de guerre, » dit Mommsen, « paralysait Philippe dans tous ses mouvements. » Ici, l’effet de la puissance maritime n’est même pas une question d’inférence.
[ …] En mettant ces faits ensemble, il est raisonnable de déduire, et soutenu par toute la teneur de l’histoire, que la puissance maritime romaine contrôlait la mer, au nord d’une ligne tracée de Tarragone en Espagne jusqu’à Lilybwum (l’actuelle Marsala), à l’extrémité ouest. de la Sicile, contournanat le côté nord de l’île par le détroit de Messine jusqu’à Syracuse, et de là jusqu’à Brindisi dans l’Adriatique. Ce contrôle dura, inébranlable, tout au long de la guerre. Elle n’excluait pas les raids maritimes, petits ou grands, comme on l’a évoqué ; mais cela interdisait les communications soutenues et sécurisées dont Hannibal avait un besoin vital.
Le stratège naval en tire une conclusion nuancée :
Si l’argument précédent est valable, il est aussi erroné d’omettre la puissance maritime de la liste des principaux facteurs du résultat, qu’il serait absurde de revendiquer pour elle une influence exclusive.
Appliqué à la guerre en Ukraine, ces réflexions peuvent nourrir des réflexions fructueuses. Rendre l’espace maritime instable, non sécurisé, empêche la Russie de ravitailler aisément ses forces en Crimée et l’oblige à emprunter des chemins exposés, ce qui renvoie d’une certaine façon à la situation connue par les Carthaginois lors de la Seconde guerre punique. Cependant, il existe une différence fondamentale ; l’Ukraine menace l’espace maritime, sans le contrôler, contrairement à la flotte romaine.
Dans les buts stratégiques ukrainiens, la perte de contrôle de la flotte russe sur la Mer Noire a rendu possible une protection à court terme de la ville d’Odessa. Cette dernière n’est plus directement menacée, protégée par le Dniepr et la reprise de Kherson en novembre 2022.
Faute de maitrise navale, une offensive russe sur Odessa ne pourrait être envisagée sans une traversée du puissant fleuve, ce qui nécessiterait de monter une opération de très grande envergure, extrêmement difficile (mais pas impossible, surtout si les Ukrainiens, comme c’est visiblement de plus en plus le cas, ne peuvent soutenir un assaut frontal, faute de munitions).
L’objectif stratégique est majeur : Odessa prise, la route vers la Moldavie, la Transnistrie, serait totalement ouverte. Mieux, la Mer Noire basculerait totalement sous le contrôle russe, les Ukrainiens perdant leur seul port, donc un débouché majeur pour leur économie, sans parler du traumatisme pour le moral. Assurément, un tournant majeur dans la guerre. Le scenario d’une poussée vers Odessa semble posé : https://www.lindependant.fr/2024/03/07/guerre-en-ukraine-une-avancee-du-front-vers-odessa-ou-vers-kiev-emmanuel-macron-annonce-ce-scenario-qui-pourrait-engager-une-intervention-de-la-france-11810700.php.
Corbett et la maîtrise de l’espace maritime
Voici ce qu’affirme le stratège alors qu’il s’apprête à explorer la théorie de la guerre navaleJulian S.Corbett, Principes de stratégie maritime, op cit, p88-89 :
Loin d’être un facteur négligeable à la mer, voire l’hérésie détestable que l’on décrit d’ordinaire, la défensive est naturellement inhérente à toute guerre et, comme nous l’avons vu, les questions capitales de la stratégie, sur terre et sur mer, oscillent autour des possibilités respectives de l’offensive et de la défensive et des proportions dans lesquelles chacune doit intervenir dans notre plan de guerre. Sur mer, le belligérant le plus puissant et le plus animé d’esprit offensif ne peut pas davantage éviter les périodes alternées de défensive, résultant des temps d’arrêt inévitables de son action offensive, qu’on ne peut les éviter sur terre. Il nous faut donc envisager la défensive ; mais avant d’être en mesure de le faire avec profit, nous devons procéder à l’analyse de l’expression « maîtrise de la mer » (Command of the Sea) et nous rendre compte exactement de ce que nous entendons par elle dans la guerre.
Tout d’abord, la maîtrise de la mer, du point de vue stratégique n’est pas identique à la conquête d’un territoire. On ne peut pas généraliser de l’un à l’autre comme cela s’est fait trop communément. Des formules telles que « la conquête de l’empire des mers » et « faire des côtes de l’ennemi notre frontière » avaient leur utilité et leur sens dans le langage de ceux qui les inventèrent, mais ce ne sont guère, en réalité, que des expressions de rhétorique fondées sur une fausse analogie et une fausse analogie n’est pas une base sûre pour une théorie de la guerre.
L’analogie est-fausse pour deux raisons, importantes pour la conduite de la guerre navale. On ne peut pas conquérir la mer, car la mer ne peut pas être une propriété, au moins au-delà des eaux territoriales. On ne peut pas, comme disent les juristes, « la tenir en possession », parce qu’on ne peut pas en exclure les neutres, comme on peut les exclure d’un territoire dont on s’empare. En second lieu on ne peut pas faire vivre une force navale de la mer comme on fait vivre une armée sur le territoire ennemi. Tirer des déductions de l’analogie entre la maîtrise de la mer et la conquête d’un territoire n’est pas scientifique et conduirait certainement à des erreurs.
La seule méthode sûre est de chercher ce que nous pouvons gagner pour nous-mêmes et faire perdre à l’ennemi par la maîtrise de la mer. Or, si nous en exceptons le droit de pêche, qui ne concerne pas notre sujet, le seul droit que nous – ou notre ennemi -avons sur mer est le droit de passage. En d’autres termes, la seule valeur positive que la haute mer ait pour la vie nationale est d’être moyen de communications. Ce moyen peut être de grande ou de faible importance pour la vie d’une nation, mais il a une valeur pour tout État maritime. En retirant, par conséquent, à l’ennemi ses moyens de passage, nous arrêtons le mouvement de sa vie nationale sur mer, comme nous l’arrêtons sur terre en occupant son territoire. Et ceci pour autant que peut tenir cette comparaison.
Telle est la valeur positive que la mer a dans la vie d’une nation. Elle a aussi une valeur négative. Elle n’est pas seulement une voie de communication ; mais à l’inverse des communications terrestres, elle est aussi une barrière. En conquérant la maîtrise de la mer, nous enlevons cette barrière de notre route et nous sommes en mesure d’exercer une pression militaire directe sur la vie nationale, à terre, de notre ennemi, tandis que nous assurons la nôtre et empêchons l’ennemi d’exercer à notre égard une pression militaire directe.
Par suite, la maîtrise de la mer ne signifie rien d’autre que le contrôle des communications maritimes pour des objectifs militaires ou commerciaux. L’objet de la stratégie navale est le contrôle des communications et non pas comme sur terre, la conquête d’un territoire. La différence est fondamentale. Il est vrai, que l’on dit, à juste titre, que la stratégie terrestre est principalement une question de communications, mais on entend le mot « communications » dans un autre sens. Il s’agit des communications propres de l’armée et non des communications plus vastes qui sont un élément de la vie de la nation.
Le propos ne saurait être plus clair, et le cas des Houthis en Mer Rouge est éclairé par le maître stratège. Il ne s’agit nullement d’une conquête territoriale, d’une occupation en bonne et due forme d’un espace maritime avec une flotte de combat, mais simplement d’une menace, permanente, sur les voies de communication occidentales. Le dernier cas en date est celui du navire britannique Rubymar, attaqué et finalement coulé il y a quelques jours, sous le regard impuissant des navires militaires occidentaux pourtant sur zone :
Voilà qui remet en perspective les buts de guerres. Pour les Occidentaux, quelque soit le coût des armements utilisés, la perte de la maîtrise maritime semble encore plus importante en Mer Rouge pour nos économies. « La pression militaire directe sur la vie nationale, à terre » est totalement perceptible, sans que les Houthis soient pour autant en possession de cet espace.
Dès lors, on peut aussi se poser la question des buts des frappes américaines et britanniques. Clausewitz apporte un éclairage dans la préface de De la guerrenote du 10 juillet 1807 :
Premièrement, les guerres dans lesquelles l’objectif est de renverser l’ennemi, que ce soit parce que nous visons sa destruction politique ou simplement parce que nous voulons le désarmer pour le contraindre à conclure la paix selon nos propres conditions. Deuxièmement, les guerres dans lesquelles notre objectif est simplement de faire des conquêtes sur les frontières de l’ennemi, soit pour -les conserver d’une façon permanente, soit pour en faire une matière d’échange lors du règlement de la paix.
Les alliés occidentaux sont ici dans le premier cas de figure : désarmer pour contraindre à la paix. Force est de constater que malgré les bombardements actuels, l’objectif semble encore assez lointain, le cas du Rubymar étant assez éclairant sur le sujet.
Est-il possible de faire autrement ? Avec subtilité Corbett rappelle que Clausewitz, que l’on présente souvent simplement en un apôtre d’une recherche de confrontation directe (la fameuse bataille décisive), avait proposé une approche indirecte face à la crise de 1830, qui voyaient les tensions monter entre France et PrusseVoir le précédent article : https://clio-prepas.clionautes.org/les-guerres-limitees.html .
Alors que les coûteux bombardements que l’on oppose aux Houthis ne semblent pas, pour le moment, porter leurs fruits, serait-il possible de réfléchir à une approche moins frontale, complémentaire, pour les contraindre à cesser leurs attaques ?
En attendant une réponse, le temps file et les stocks de munitions diminuent aussi vite que les coûts s’accroissent pour les reconstituer. Et si, finalement, par la voie de l’attrition, la clé du succès n’était pas là ? Il est temps de sonder un autre stratège majeur, ancien général du Tsar, devenu communiste, victime, comme tant d’autres, des purges stalinienne : Alexandre Svietchine.
to be continued …