Introduction – Vers un choc des civilisations ?

*Accroche
Le 11 septembre 2001 confirme pour les Néoconservateurs de la nouvelle administration Bush la théorie de Samuel Huntington, exprimée dans divers articles et surtout dans son best-seller The Clash of Civilizations

paru en 1993. Selon cette approche, au sortir de la Guerre Froide, la sécurité et la paix entre les Etats doit à présent se penser non d’un point de vue idéologique mais d’un point de vue culturel. Il s’agit donc pour l’ancien adjoint de Zbigniew Brzezinski au National Security Council sous la présidence Carter de questionner l’identité comme source de paix ou au contraire de conflit.

*Redéfinition
Le sujet invite donc à s’interroger sur une matrice essentielle des conflits actuels qui serait d’ordre culturel. Cette grille de lecture, plus partagée dans les sphère politiques et journalistiques que universitaire pose de nombreux problèmes. L’un des premiers, et non des moindres, est que si l’expression est connue, rares en réalité sont les personnes qui l’emploi en ayant effectivement lut Huntington au delà de quelques compte rendus partiels.

*Problématique
En quoi le choc des civilisations est plus devenu une réalité auto réalisatrice qu’une réelle grille de lecture pertinente des conflits actuels ?

 

*Idée maîtresse
Pierre Hassner affirmait en 2008 dans La Croix que « l’intuition de Huntington est juste au niveau le plus général : devant la peur de perdre son identité avec la globalisation, la fin des modes de vie traditionnels, l’émergence de grandes villes inhumaines, tout le monde cherche ses racines et une identité » avant de rajouter que « les conséquences politiques de sa pensée peuvent être dangereuses ».
Il s’agira donc ici d’appréhender les arguments pertinents de Huntington tout en insistant sur les faiblesses de cette approche.

 

*Annonce plan

J’organiserai mon exposé autour de deux idées directrices :
1 – Les conflits actuels évoquent un choc des civilisations, Huntington semble donc avoir vu juste.
2 – L’essentialisation de certaines approches, à commencer par le poids supposé dans les relations internationales de l’Islam ou de l’Occident oblige néanmoins à une analyse plus fine des tensions actuelles.

 

Développement – Vers un choc des civilisations ?

1 – Les conflits actuels évoquent un choc des civilisations, Huntington semble donc avoir vu juste.

3 idées secondaires (IS)

1 exemple par IS

• IS1 : depuis l’effondrement de l’URSS qui solde la fin de la Guerre Froide, l’Occident domine le monde. C’est vrai en terme de création de richesse, mais aussi dans la diffusion de ses normes technologiques ou culturelles, à commencer par le libéralisme économique, la démocratie et les Droits de l’Homme.

• IS2 : face à cet Occident, de nombreux fronts de contestation se sont constitués. Les attaques du 11 septembre 2001 constituent une agression contre les USA mais aussi contre l’Occident. C’est d’ailleurs le sens de l’intervention de l’OTAN en Afghanistan dès le mois d’octobre 2001. Al Qaïda, à travers Oussama Ben Laden place l’enjeux central du conflit sur une logique culturelle, avec la recherche d’une union des Musulmans contre les « Croisés occidentaux ».

• IS3 : l’émergence de Daesh, les attentats en France, au Royaume-Uni, à Barcelone, à New-York sont autant d’attaques contre un mode de vie. Face à ce puissant mouvement, les opinions publiques occidentale accompagnent un mouvement parallèle de repli identitaire, illustré par les nombreux succès électoraux de partis qualifiés de populistes, à commencer par la victoire de Donald Trump fin 2016. Ce dernier est en totale adéquation avec les théories accompagnant un choc des civilisations, un nécessaire repli identitaire, une stigmatisation de l’autre (par exemple ses discours agressifs face aux Musulmans, le choix d’interdire certaines communautés au droit de venir aux USA).

Transition : Les conflits actuels incarnés par les attaques terroristes ou l’arc de crise allant du Sahel à l’Afghanistan donnent corps à la théorie d’un monde musulman confronté à un Occident qui se replie sur lui-même. Pourtant, le paradigme de Huntington comporte des lacunes majeures.

2 – L’essentialisation de certaines approches, à commencer par le poids supposé dans les relations internationales de l’Islam ou de l’Occident oblige néanmoins à une analyse plus fine des tensions actuelles.

• IS1 : une bonne partie des conflits actuels ne répondent absolument pas au choc des civilisations. En Syrie comme en Irak, les Musulmans sont opposés. Les attaques terroristes sont d’abord et avant tout dirigés contre des Musulmans. La caisse de résonnance médiatique démultiplie les effets humains réels des attaques à Paris, Londres, Berlin ou Barcelone. L’essentiel des Musulmans vivant en Europe sont bien intégrés et on oublie trop souvent que de nombreux arabes sont Chrétiens ou que l’Islam du Moyen Orient est différent de celui des Philippines ou des espaces occidentaux de la Chine. De la même façon en Ukraine, ce sont des Européens, culturellement chrétiens, qui s’affrontent.

• IS2 : comme l’ont montré les critiques réalistes tel J.Kirkpatrick, il est faux de penser que le monde gravite autour d’un conflit Occident-Islam. C’est faire peu de cas du principal bouleversement géopolitique du début du XXIè siècle, à savoir le retour au premier plan de la Chine. Cette puissance semble la seule aujourd’hui capable de contester le leadership des USA, à tous les niveaux. Chine capable du plus grand pragmatisme en associant communisme et libéralisme, défendant ses intérêts propres, investissant en Afrique, alimentant ou laissant faire les conflits au Soudan par exemple. Les Européens n’ont pas les mêmes intérêts que Washington, comme Angela Merkel l’a rappelé après l’élection de Donald Trump. La Russie suit sa propre voie, l’Amérique latine est confrontée à ses propres logiques. L’essentialisation proposée par Huntington semble donc trop restrictive.

• IS3 : la prospective actuelle fait des bouleversements climatiques l’un des enjeux essentiels des années à venir. La raréfaction de certaines ressources, l’abandon de terres soumises à des contraintes climatiques trop fortes sont autant de sources de potentiels conflits. Que l’on songe à la hausse du niveau des mers et à la situation dramatique autour dans le Golfe du Bengale, aux migrations des populations subsahariennes vers le nord de la Méditerranée. Tout aussi prégnantes sont les problématiques liées aux inégalités de développement, à l’écart croissant entre les plus riches et les plus pauvres (les 10% les plus riches détiennent 90% des richesses…)

 

Conclusion – Vers un choc des civilisations ?

 

=> + ID1 + ID2 + IM

Si de nombreux conflits semblent donner raison à Huntington et aux défenseurs d’un choc des civilisation, force est de constater qu’une analyse géopolitique plus fine force à beaucoup de prudence quant aux mécaniques culturelles dans les guerres actuelles et à venir.

=> Ouverture

Al-Qaïda et Daesh œuvre largement à une mise en scène macabre d’un choc des civilisations. Il appartient aux démocraties de réfléchir aux moyen d‘y faire face. Ici la résilience est au cœur des problématique, tout comme les interventions doivent dépasser la simple pulsion de l’émotion, au risque de générer des chaos plus graves.

Sites annexes et bibliographie

Quand Samuel Huntington définissait le « choc des civilisations »

Le 11 septembre annonce-t-il un « choc des civilisations » ?

Le Choc des civilisations. Aspects d’un mythe politique contemporain

Une introduction à la géopolitique avec Olivier Zajec