Introduction

Le rôle de l’intelligence économique

*Accroche

Depuis la fin de la Guerre Froide l’économie est passée au premier rang des rapports de puissance. Il ne s’agit plus de conquérir des territoires mais de permettre la défense de son intégrité par un potentiel technologique, industriel et commercial capable d’assurer l’indépendance des États. Force est de constater que l’émergence de nouvelles puissances a marqué une redistribution des rapports de force hérités de l’affrontement Est-Ouest. Ainsi les « BRICS » (Brésil, Russie, Union indienne, Chine et Afrique du Sud) et bien que ceci soit réducteur – on pensera par exemple au fait que le Mexique, le Pakistan ou l’Indonésie ne soient pas inclus alors que technologiquement, économiquement ou militairement ce sont des puissances comparables au Brésil – sont capables de damner le pion des anciennes puissances dans certains secteurs économiques. Ce qui est parfois nommé avec rapidité « guerre économique » repose d’une part sur l’exaspération de la concurrence et, d’autre part, l’avènement de nouvelles manifestations des affrontements interétatiques. Ces conflits latents incluent États et Entreprises dans une dialectique complexe et dans un contexte singulier. La globalisation et la mondialisation, la disparition de certaines barrières favorisant les échanges, les reculs, les zones grises échappant aux règles internationales, tout cela constitue le contexte des affaires depuis l’effondrement de l’URSS en 1991 et l’entrée à l’OMC de la Chine en 2001.

 

*Redéfinition

Le sujet invite donc à s’interroger sur les capacités des États et des entreprises de garder leur place dans une compétition internationale exacerbée. Les différents actifs sont clairement sous des menaces plurielles, vol de données, de brevets, guerre de réputation, d’informations stratégiques émanant de puissances rivales mais aussi de grands groupes internationaux ou d’activistes tels les « Anonymous » et les Hackers de leur galaxie.

*Problématique

Dans quelle mesure l’intelligence économique est-elle devenue une clé de lecture majeure dans la capacité à préserver ses intérêts et sa puissance ?

 

*Idée maîtresse

L’intelligence économique concerne à la fois les Entreprises et les États. Le choix sera fait ici de traiter spécifiquement des questions liées à la Défense, en insistant sur les priorités stratégiques de préservation de l’indépendance et la résilience de l’État et de la Nation.

 

*Annonce plan

J’organiserai mon exposé autour de deux idées directrices :
1 – La définition d’un référentiel de l’Intelligence économique face aux enjeux actuels.
2 – La mise en pratique de cette grille d’analyse dans le cadre de l’économie de la Défense.

 

Développement – Le rôle de l’intelligence économique

 

1 – La définition d’un référentiel de l’Intelligence économique face aux enjeux actuels.

3 idées secondaires (IS)

1 exemple par IS

• IS1 : Si l’on prend appuie sur les 20 dernières années, l’une des caractéristiques est le poids de plus en plus grand pris par le cyberespace. Ce dernier s’immisce partout, le numérique connecte, mais aussi colonise via les robots, les Smartphones etc. Villes, transports, énergie : autant de lieu et de secteurs qui sont englobés. Le bilan des attaques cyber de 2016 est sans appel. On citera celles, majeures, contre l’hébergeur français OVH ou la société américaine DYN ; mais il ne faut pas oublier la multitude d’attaques de faible niveau contre des entreprises de type ETI ou l’usurpation d’identité ou l’attaque des hôpitaux britanniques de mai 2017. Ces attaques viennent d’Entreprises, d’Etats ou d’acteurs informels tels les Hackers type Anonymous. Dans tous les cas, les coûts économiques sont de plus en plus élevés pour les pays développés ce qui nécessite une réflexion profonde de mise en intelligence économique.

• IS2 : la mondialisation actuelle nécessite une prise de conscience des interconnexions accrues entre les différentes composantes économiques, politiques, sociales et culturelles. Ainsi le rapport Martre, publié en 1994, définit l’intelligence économique comme « l’ensemble des actions coordonnées de recherche, de traitement, et de distribution, en vue de son exploitation, de l’information utile aux acteurs économiques ». Conseiller le gouvernement, favoriser l’avènement de synergies entre le public et le privé pour bâtir une stratégie de puissance économique, ancrée dans nos territoires. En 2005 un groupe piloté par Alain Juillet reformule la définition de l’IE : « la maîtrise et la protection de l’information stratégique pour tout acteur économique. Elle a pour triple finalité la compétitivité du tissu industriel, la sécurité de l’économie et des entreprises et le renforcement de l’influence générale de notre pays ».

• IS3 : trois missions peuvent être aisément définies. La veille, qui consiste à se renseigner sur les concurrents, agréger des données, les traiter afin de percevoir les évolutions à venir et s’adapter. On pensera par exemple à la monté en puissance des drones qui n’a pas été perçue de la même façon en France et aux USA. Ensuite la sécurisation ; chaque avancé technologique est susceptible d’être volée et il faut s’en prémunir ; dans le cas inverse, il faut être capable de connaître au mieux ce qui se fait chez les autres. Enfin il faut creuser le sillon de l’influence, facteur devenu décisif dans la mobilisation des différents acteurs. Par exemple être capable d’influer sur les normes internationales en imposant ses normes (on pensera à la lutte du Minitel …).

Transition : L’intelligence économique est partie intégrante des rapports de puissance dans ce qu’elle assure, ou non, l’indépendance des décideurs au plus haut niveau de la hiérarchie des affaires économiques, politique et sociales. Il convient à présent d’étudier plus avant l’Intelligence économique dans le secteur de la Défense.

2 – La mise en pratique de cette grille d’analyse dans le cadre de l’économie de la Défense.

• IS1 : Thucydide l’avait déjà montré pour le conflit opposant Athènes à Sparte au Vè siècle avant notre ère : l’argent est un facteur essentiel de la Guerre et de la capacité des Etats à survivre. Plus proche de nous, la guerre lancée contre l’Irak en 2003, couplée à l’intervention en Afghanistan depuis 2001, a coûté aux USA plus de 3000 milliards de dollars. Outre l’échec politique, il faut se questionner sur le coût industriel. Comme pour la guerre du Vietnam, la haute intensité technologique choisie par les USA est à mettre en relation avec les coûts économiques comparativement très faibles engagés par les adversaires, Viêt-Cong ou Talibans. Une réflexion doit donc être menée sur le ratio coût-efficacité des missions et surtout matériels engagés. À titre de comparaison la Russie a fait le choix de bombes classiques en Syrie, avec tous les risques de dommages collatéraux induits, face aux munitions très précises des occidentaux, mais autrement plus coûteuses.

• IS2 : la question de l’autonomie stratégique en matière de Défense est centrale ; c’est exactement ce qui ressort de ce commentaire de Charles de Gaulle le 3 novembre 1959 notamment : « il est indispensable que la France se défende par elle-même, pour elle-même et à sa façon […] Il faut que nous sachions nous pourvoir dans les années qui commencent, de ce qu’il est convenu d’appeler une force de frappe, susceptible d’agir pour notre compte, à tout moment et n’importe où ». C’est dans cette optique que s’explique le choix pour la France de se doter d’un arsenal nucléaire. Les bombes ne suffisent cependant point ; encore faut-il maîtriser les vecteurs, missiles et avions ce qui explique le choix de la France de favoriser l’acquisition vers les fournisseurs résidents sur le territoire national tant en matière conventionnelle que de dissuasion, avec par exemple le concours de la DGA. Mais ce choix a son revers face aux conjectures économiques ainsi les F8E Crusaders de la Marine non remplacés jusqu’à la mise en service des Rafales, mise en service repoussée aux rythmes des réductions budgétaire. Par manque d’intelligence économique prospective la France a du se rapprocher des USA pour palier ses déficiences en drones. Une autre solution peut être la mise en commun de programmes avec nos alliés européens, tels les programmes tels les Tigre, NH90 ou A400M.

• IS3 : enfin il est impératif de penser l’économie de la Défense en tenant compte des conjectures potentielles que seule une intelligence économique fine est à même d’appréhender aux côtés des analyses géopolitiques. Ainsi l’explosion des OPEX , l’Opération Sentinelle, dans un contexte économique défavorable des derniers décennies, est à mettre en perspective avec le choix de développer des matériels nationaux mais plus chers (faibles quantités, course à la technologie, coûts de recherches, difficulté à l’exportation face à des concurrents très agressif etc. etc.). C’est ici un peu le syndrome du Concorde appliqué au Char Leclerc, les errements de l’A400M face au C130 Hercule rustique mais acheté sur étagère, le manque de véhicules blindés face aux IED et l’allongement du remplacement des matériels à bout de souffle tels les VAB et autres Sagaies.

 

Conclusion – Le rôle de l’intelligence économique

=> + ID1 + ID2 + IM

L’Intelligence économique est une grille de lecture essentielle. Ce référentiel permet de donner au pouvoir les capacités de décision dans un contexte de fortes tensions et de recherche continue d’indépendance. Faute d’une bonne analyse des enjeux, l’État, la Nation, peuvent se trouver démunies à des degrés divers, engageant parfois la vie des personnels sur le terrain.

=> Ouverture

En matière de Défense il semble acquis que les Occidentaux ont fait le choix de plus de technologie, suivant la RAM initiée aux USA. Le conflit de Syrie offre une mise en perspective intéressante qui est d’ailleurs celle déjà tirée du conflit afghan. Avec moins de moyens, plus rustiques, les forces soviétiques puis russes ont obtenu des résultats qui n’ont pas à rougir face à ceux obtenus par les USA. On peut s’interroger sur les effets du manque de moyen, nécessitant plus de pragmatisme ou, a contrario, sur l’opulence de moyen rendant l’Intelligence économique secondaire. C’est à titre d’exemple tout le débat des F35 aux coûts gigantesques, chargés de casser aujourd’hui des blindés pensés dans les années 50 et 70 sans craindre de croiser des chasseurs adverses, à moins de songer à une confrontation de haute intensité destructrice. De la même façon se pose la question de nos capacités à fournir suffisamment de munitions et à remplacer les matériels usés par le combat. 200 chars de bataille auraient tôt fait de disparaître des théâtre d’opération en cas de guerre à haute intensité, hypothèse aujourd’hui clairement sur la table.

 

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Sites annexes et bibliographie

L’« IE » ou intelligence économique, atout stratégique

Intelligence économique, armement et sécurité – IHEDN

Intelligence économique collaborative et industrie de l’armement terrestre

Quels enjeux internationaux pour l’économie de la défense ?