AGRÉGATION INTERNE -FICHE BIOGRAPHIQUE de Maïmonide
Maïmonide, Rabbi Moshé ben Maïmon, couramment appelé le « Rambam » par son acronyme, est l’un des personnages juifs les plus connus du Moyen-Âge. Son nom arabe est Abu’Imran Musa ibn Maymun.
L’homme et son temps :
Né à Cordoue (Al-Andalus), Maïmonide a étudié l’arabe et le Coran auprès d’un musulman comme d’autres garçons juifs. Sa famille se réfugie à Fez puis en Égypte quand les Almohades contrôlent Al-Andalus et commencent à persécuter des juifs (1140-1148 : vague de persécutions des Juifs en Espagne et au Maghreb almohades), elle craint une conversion forcée à l’islam. Le frère David, négociant en joyaux nourrit la famille,et à sa mort, Maïmonide exerce la médecine et rédige des traités. Sa réputation et ses écrits médicaux l’introduisent à la cour fatimide du Caire; c’est un des seuls offices publics pouvant être détenu par un juif car il dépend du seul souverain. Il devient le chef de la communauté (ras al yahud/ nagid) mais pas celui de la yeshiva locale. Cela lui permet d’être juge et également un guide pour d’autres communautés juives en dehors de l’Égypte, surtout les régions soumises aux califes fatimides mais aussi en Irak. Il est enterré à Tibériade. Son fils lui succède en tant que nagid des juifs d’Égypte.
Son œuvre :
Ses écrits sur la Mishna et le Talmud (dont la Mishne Torah : monumentale synthèse de la loi rabbinique) circulent à travers tout le monde juif et lui confèrent une autorité magistrale. Chez les Juifs, on dit encore aujourd’hui: « de Moïse à Moïse, il n’y eut personne comme Moïse », en se référant au Moïse biblique et à Maïmonide comme aux plus hautes autorités en matière de halakha. D’autres le nomment le « grand aigle de la synagogue »,car il est un codificateur du Talmud. Son code est repris et commenté sans interruption depuis le XIIIème siècle et il a permis l’élaboration d’un système juridique solide auquel se référaient les communautés de la diaspora.
La réputation universelle de Maïmonide lui vient de ses écrits philosophiques dont Le Guide des Égarés. Il est rédigé en arabe noté en caractères hébraïques. Maïmonide utilise la philosophie aristotélicienne (et donc grecque) pour comprendre et conceptualiser la création divine et la nature de Dieu. Ainsi, il conjugue le rationalisme et la théologie juive médiévale. Le Guide des Égarés est traduit en hébreu de son vivant et en latin (par des juifs de Palerme) et fournit une base à des textes philosophiques et théologiques dans les trois religions (chez les Chrétiens : Thomas d’Aquin au XIIIème siècle).
Conclusion :
Le cas de Maïmonide montre les influences culturelles entre juifs et musulmans mais aussi leurs rapports culturels. Sa philosophie est influencée par celle des auteurs arabes de son époque (al Farabi- 950), ses décisions juridiques par la science juridique musulmane qu’il connaissait. Certains auteurs musulmans le citent et soulignent qu’il s’est converti à l’islam, mais ils sont les seules sources de cette affirmation.
Les juifs sont plus influencés par les intellectuels musulmans que le contraire. L’univers que les juifs ont établi quelques siècles auparavant par besoin de communiquer entre eux s’enrichit de la connaissance de la culture arabe et musulmane, mais il demeure un univers juif en raison de l’opposition des musulmans à leur intégration, dans la vie politique surtout.
Sources :
Antoine Germa, Benjamin Lellouch et Évelyne Patlagean (dir.), Les Juifs dans l’histoire : de la naissance du judaïsme au monde contemporain, Champ Vallon, 2011.
Claude Gauvard, Alain de Libera, Michel Zink (dir.) Dictionnaire du Moyen-Âge, PUF, 2002.
Vocabulaire :
Gemara, en araméen, « achèvement » ou « tradition » : Commentaire de la Mishna, formant avec celle-ci le Talmud.
Halakha, « voie » : corpus légal de la Mishna et du Talmud. Par extension, Loi juive.
Mishna, « enseignement », « répétition » : compilation en six sections ou « ordres » de la Loi orale, achevée vers 200 ap. J.-C.
Nagid : chef temporel d’une communauté juive, dans le monde musulman. En arabe, ras al-yahud.
Talmud : 1) synonyme de Gemara. 2) ensemble formé par la Mishna et la Gemara. Il exsite deux versions du talmud : celle élaborée en Mésopotamie (dite « de Babylone ») et celle élaborée en Palestine (dite de « Jérusalem »).
Yeshiva : Académie, école talmudique. Lieu d’étude et de transmission de la Loi.
©Céline Aleau, 10 octobre 2018