La Big History est une approche historique globale qui étudie l’histoire universelle dans l’espace et dans le temps, depuis l’origine du monde (le Big Bang) jusqu’à aujourd’hui. Elle intègre autant l’histoire que la cosmologie, les sciences humaines et les sciences dures. De cette manière, la vision du temps est entièrement modifiée. Celle de l’histoire environnementale l’est aussi.

Plan de la fiche

I. Une nouvelle histoire du temps

II. Les arguments en faveur d’une histoire depuis le Big Bang

III. Une autre approche de l’histoire environnementale

I. Une nouvelle histoire du temps

« The temporal scales of modern cosmology are as daunting as its spatial scales. Ever since Edwin Hubble showed, in the 1920’s, that the universe was expanding, it has seemed possible, in principle, to determine the age of the universe by estimating its rate of expansion. The details of this calculation are tricky, but today cosmologists are converging on an age of about 13 billion years. We cannot really grasp such colossal periods of time, but, with an imaginative effort, we can perhaps get some sense of their relationship to human history. The chronology in Table 1 collapses the timescales of modern cosmology by a factor of one billion. It reduces thirteen billion years to thirteen years, and picks out some of the dates within theses scales that are most significant for our own species.

All in all, it may seem that our earth and our species have no significance at all within modern cosmology »1.

La Big History est apparue aux Pays-Bas dans les années 1980, puis en Australie et aux Etats-Unis à la fin du XXe siècle. Son meilleur défenseur est David Christian, qui a inventé le concept2.
Dans « The Case for ‘Big History’ » (Journal of World History, 2, 1991, p. 223-238), il est le premier à poser la question du renouvellement des échelles : « What is the scale on which history should be studied ? The establishment of the Journal of World History already implies a radical answer to that question : in geographical terms, the appropriate scale may be the whole of the world. In this paper, I will defend an equally radical answer to the temporal aspect of the same question : what is the time scale on which history should be studied ? ». Le Big Historian cherche à expliquer la longue évolution de l’expérience humaine. Il s’agit d’analyser les évolutions sociales planétaires sur la longue durée, de ne mettre en évidence que les « processus non programmés qui déclenchent un mouvement généralisé de décloisonnement des sociétés et d’unification sociale mondiale qu’on appelle mondialisation »3. La Big History unit l’histoire naturelle et l’histoire humaine dans une seule narration.
Selon David Christian, l’échelle de temps la plus appropriée est celle de la totalité du temps depuis la création de l’univers, c’est-à-dire il y a 13,8 milliards d’années. Ses préoccupations rejettent donc absolument la micro-histoire et la micro-histoire globale. L’histoire mondiale, malgré toute la nouveauté ce qu’elle apporte à l’échelle d’analyse, n’est pas non plus suffisante. Le temps de la vie humaine peine à être connecté à l’histoire de l’univers. La « longue durée » de Braudel est une réussite, mais elle est toute relative : elle ne remonte qu’à 60 000 ans. Ce dont l’Histoire a besoin, ce serait d’une compréhension beaucoup plus large, limitée seulement par la question des origines de l’univers. L’exploration du passé à une très grande échelle implique, pour l’historien, de se projeter en-dehors de tous les cadres et de toutes les conventions établies par la discipline.

II. Les arguments en faveur d’une histoire depuis le Big Bang

Bien avant Maps of Time (2005), David Christian défendait plusieurs arguments en faveur de la Big History.

Premièrement, l’histoire aura un impact puissant sur la pensée du public sur le passé parce qu’elle commencera à jouer un rôle similaire à celui des récits de création traditionnels : elle aspirera à créer une carte du passé dans son ensemble.

Rappelons que David Christian a d’abord travaillé sur la Russie soviétique pendant la guerre froide, et donc sur la division idéologique du monde. Enfant, il a vécu la « peur nucléaire » lors de la crise des missiles de Cuba. Cette première expérience et ses recherches ultérieures l’ont amené à s’interroger sur l’utilité des histoires qui opposent l’humanité entre elle. La « Nouvelle histoire universelle » doit considérer l’humanité comme un seul ensemble, et non plus comme une mosaïque factice de peuples et de nations qui s’opposent. En réalisant des « cartes universelles du passé » (ce qu’il appelle Maps of time), il sera facile de voir que tous les êtres humains partagent une histoire commune et tout à fait distincte.
Cette idée est importante et devient un argument majeur de l’épistémologie renouvelée par la Big History. Rappelons qu’en 1979, Jean-François Lyotard annonçait, dans La condition postmoderne, que « les grands récits sont devenus peu crédibles. On est alors tenté d’accréditer le grand récit du déclin des grands récits ». Pourtant, face à la montée des nationalismes et au retour des frontières dans un monde pourtant mondialisé mais ultra-concurrentiel, le développement d’une nouvelle conception humaniste de l’humanité devient urgent4.

Jusqu’au XIXe siècle, les historiens ont écrit une histoire universelle qui leur permettait d’expliquer, chacun à leur manière, les origines du monde. Par la suite, cette forme narrative a disparu.

Pour David Christian, l’histoire universelle a été balayée par 1) une préoccupation croissante pour la rigueur « scientifique » ; 2) la préférence pour l’histoire nationale et nationaliste ; 3) l’institutionnalisation rapide des méthodes allemandes d’enseignement et de recherche inspirées de Leopold von Ranke. Dans leur influente Introduction à l’étude de l’histoire, écrite en 1898, les fondateurs de l’histoire positiviste Charles-Victor Langlois et Charles Seignobos écrivent : « L’historien travaille avec des documents. Les documents sont les traces laissées par les pensées et les actions des hommes d’autrefois… Pas de documents, pas d’histoire. » Cette ascèse méthodologique excluait inévitablement l’histoire universelle et celle des mythes de fondation, souvent oraux. De plus, le nationalisme a encouragé le rétrécissement de l’orientation scientifique. Il offrait un objet historique – l’État-nation – qui fixait des limites claires, gérables, voire séduisantes à la recherche historique, attirait des montants importants de financement gouvernemental en raison de son importance dans l’éducation publique et attirait l’attention d’un large lectorat intéressé par l’histoire de sa propre communauté imaginaire.

Deuxièmement, une histoire écrite depuis le Big Bang autorise à poser de nouvelles questions et à revoir notre compréhension du passé. Elle interroge la place toute relative de l’humanité dans l’histoire de l’univers. Elle renvoie à des questionnements qui ont cours dans l’esprit humain depuis des millénaires : la nécessité de s’expliquer notre présence dans l’univers.

Les mythes de création de l’univers sont anciens et les premières traces peuvent être trouvées aussi bien en Mésopotamie qu’en Inde, en Chine et en Mésoamérique (Hervé Inglebert, Le monde, l’histoire. Essai sur les histoires universelles, PUF, 2014). Raoul Mortley a retracé l’émergence d’une tradition de conscience de soi dans le monde méditerranéen peu après les conquêtes d’Alexandre le Grand (The Idea of Universal History from Hellenistic Philosophy to Early Christian Historiography, Edwin Mellen Press, 1996). Les légendes de création découlent d’une relation entre des communautés humaines particulières et l’univers tel que ces communautés l’imaginent. Ils offrent des réponses à des questions universelles à de nombreuses échelles différentes. Le judaïsme a lui aussi développé son propre mythe de création : la Genèse. Puis, les chrétiens, à partir de La cité de Dieu de Saint Augustin, ont renforcé ce mythe de création de l’univers par un dieu unique. En Inde, en Chine, les origines cosmiques des âges du monde et de ses mythes fondateurs apportent des explications philosophiques et religieuses à l’existence physique de la Terre, de l’Univers et de tous ceux qui le peuplent.

Ce que David Christian s’efforce de réaliser, c’est une carte mentale absolue du temps, un nouveau mythe de création qui s’appuie sur l’ensemble des sciences modernes et de leurs découvertes. Alors que nos ancêtres abusaient des récits mythologiques, les progrès de la science moderne permettent enfin d’écrire la vraie histoire de l’origine du monde, sans avoir recours aux dieux et aux esprits. Cette histoire passe par une série de seuils (thresholds qui marquent l’évolution et la transformation de l’univers dans le passé et dans l’avenir.

David Christian s’est efforcé de mettre en application son projet, en renouvelant la pédagogie de l’histoire dans les universités américaines. A l’étranger, il a d’abord enseigné un cours universitaire à l’Université Macquarie de Sydney (Australie) sur l’histoire de la Russie, son premier sujet de recherche (1985-1998). A Macquarie, il propose un nouveau cours après s’être posé la question : « pourquoi ne pas commencer du début ? ». Le premier cours de Big History est ainsi professé en 1989. Fascinant pour les nombreux étudiants qui suivent ces lectures, leur contenu l’est aussi pour ses collègues qui se joignent à Christian et lui apportent leurs propres connaissances.

David Christian s’est ensuite attaché à étendre l’audience de la Big History, principalement aux Pays-Bas (où enseignent Johan Goudsblom et Fred Spier) et aux Etats-Unis (avec le soutien de Tom Griffiths, Edmund Burke III, Ross Dunn, Arturo Giráldez, William McNeill, Cynthia Brown…).

En 1998, la World History Association et l’American Historical Association mettent la Big History à l’affiche de leur réunion annuelle. En 2001, David Christian quitte l’université de Macquarie pour San Diego.
Ayant complété ses connaissances sur les origines de l’univers, David Christian a publié Maps of Time : an Introduction to Big History en 2005, puis Big History : Between Nothing and Everything (2014) et Origin Story : a Big History of Everything (2018). En 2011, il présente une conférence TED sur le sujet en 18 minutes (https://www.ted.com/talks/david_christian_the_history_of_our_world_in_18_minutes/transcript?language=fr). il existe également des cours en ligne sur la Big History (https://www.mooc-list.com/instructor/david-christian). L’International Big History Association est créée en avril 2011, qui cherche à développer le champ de la recherche et de l’enseignement ; elle organise la première conférence internationale sur la Big History à Chicago en août 2012.
Peu de temps auparavant, en mars 2011, Aux Etats-Unis, David Christian rencontre Bill Gates qui décide de financer la création d’un cours de niveau secondaire, accessible à tous en ligne : le Big History Project. Ce cours est basé sur l’étude de 8 moments charnières de l’histoire de l’humanité : le Big Bang, l’apparition des étoiles, l’apparition de la matière, la formation du système solaire et des planètes, l’apparition de la vie sur Terre, l’apprentissage collectif, le développement de l’agriculture, la révolution moderne (https://bhp-public.oerproject.com/).

La réflexion de David Christian et des autres historiens de la Big History est la suivante : sous la diversité et la complexité impressionnantes des connaissances modernes, il y a une unité et une cohérence sous-jacentes, garantissant que les différentes échelles de temps ont vraiment quelque chose à se dire. Prises ensemble, ces histoires ont toute la puissance et la richesse d’un cycle traditionnel de mythes de la création. Ils constituent ce que les Australiens autochtones pourraient appeler un « rêve » moderne5 – un compte rendu cohérent de la façon dont nous avons été créés et comment nous nous intégrons dans le schéma des choses. Pour David Christian, essayer de regarder l’ensemble du passé est comme utiliser une carte du monde. Aucun géographe n’essaierait d’enseigner exclusivement à partir de cartes routières. Pourtant, la plupart des historiens enseignent le passé de nations particulières, ou même de civilisations agraires, sans jamais se demander à quoi ressemble l’ensemble du passé. Alors, quel est l’équivalent temporel de la carte du monde ? Existe-t-il une carte du temps qui embrasse le passé à toutes les échelles ? C’est un bon moment pour soulever de telles questions, car il y a un sentiment croissant, dans de nombreuses disciplines savantes, que nous devons aller au-delà du récit fragmenté de la réalité qui a dominé la recherche (et l’a bien servie) pendant un siècle. Les scientifiques ont progressé le plus rapidement dans cette direction (voir les tentatives d’écriture d’une histoire de l’humanité par H. G. Wells après les massacres de la Grande Guerre, et la grande théorie unifiée de Stephen Hawking, A Brief History of Time, 1998).
Ainsi, les systèmes de connaissances, comme les cartes, sont un mélange complexe de réalisme, de flexibilité, d’utilité et d’inspiration. Ils doivent offrir une description de la réalité qui se conforme dans une certaine mesure à l’expérience de bon sens. Mais cette description doit aussi être utile. Il doit aider à résoudre les problèmes qui doivent être résolus par chaque communauté, qu’ils soient spirituels, psychologiques, politiques ou mécaniques.
À leur époque, tous les mythes de la création offraient des cartes réalisables de la réalité. Ils ont donné un sens à ce que les gens savaient. Ils contenaient beaucoup de bonnes connaissances empiriques ; et leurs grandes structures aidaient les gens à se placer dans une réalité plus large. Mais chaque carte devait s’appuyer sur les connaissances et répondre aux besoins d’une société particulière. Et c’est pourquoi ils ne comptent pas nécessairement comme « vrais » en dehors de leur environnement domestique. Un mythe de la création moderne est conçu pour les personnes qui vivent dans le monde moderne. Il s’agit d’essayer de comprendre notre univers.

Troisièmement, la Big History favorise l’interdisciplinarité en utilisant les apports de l’astronomie, de la cosmologie de la climatologie, de l’archéologie, de la démographie, de la biologie.

La Big History s’interroge sur le processus de sélection naturelle, sur l’adaptabilité de l’espèce humaine à son environnement et sur la constitution des ensembles linguistiques et sociétaux, plutôt que sur les apprentissages individuels qui n’ont qu’un impact limité sur l’évolution des espèces. David Christian insiste ainsi sur le « collective learning » puisque c’est l’agent principal de l’adaptabilité humaine, de son développement à l’intérieur de son milieu, ainsi que le principal critère de différenciation entre l’histoire humaine et l’histoire naturelle6.

III. Une autre approche de l’histoire environnementale

Dès lors, le deuxième champ de recherche de la Big History concerne l’étude de l’impact écologique de la présence humaine sur le milieu bioclimatique. Après William et John McNeill (The Human Web. A Bird’s Eye View of World History, Norton, 2003 ; Mosquito Empires: Ecology and War in the Greater Caribbean, 1620-1914, Cambridge University Press, 2010), de nombreux historiens se sont intéressés à la géohistoire environnementale et au concept de « human ecological power » depuis la période du Paléolithique7. L’invention de la roue, de la taille de la pierre, la maîtrise du feu, l’élevage des animaux sauvages, sont les plus anciennes formes de ce pouvoir écologique. Par la suite, le Néolithique a vu la mise en place des premières sociétés organisées. L’Homme, devenu chasseur, éleveur et constructeur, a accéléré la transformation du milieu naturel. L’âge de l’Holocène entraîne le développement de la métallurgie et la maîtrise technologique jusqu’à nos jours. Depuis quelques années, certains spécialistes (tels que le Prix Nobel de climatologie Paul Crutzen8) parlent d’un nouvel âge : l’Anthropocène. Si, dans l’Holocène, l’Homme utilisait les ressources de son milieu pour y évoluer (le milieu continuant de s’imposer sur la force d’adaptabilité de l’espèce), dans l’Anthropocène, l’action de l’Homme devient la principale force de changement sur Terre : désormais, son mode de vie transforme la planète et non l’inverse.

Chacun à leur manière, David Christian et Dipesh Chakrabarty remettent en question l’échelle de l’Etat-nation dans l’écriture des grandes narrations historiques. Dans « The Return of Universal History » (History and Theory, 49, 2010, p. 6-27), David Christian croit à l’avenir de l’histoire universelle car celle-ci est la seule à pouvoir changer notre rapport au passé. Selon lui, un changement d’échelle est indispensable : les histoires à très petites échelles et les histoires nationales devront être abandonnées au profit des approches plus globale, l’histoire de la planète étant beaucoup plus cohérente. Ce changement doit contraindre les historiens à remettre en question leurs propres pratiques pour en adopter de nouvelles. Comme le résume Florence Prévost, « il considère qu’il ne s’agit donc plus de simplement faire l’histoire de l’homme, mais bien l’histoire de l’univers afin de dégager les grandes tendances pour finalement mieux comprendre notre place dans le monde. Pour arriver à un tel changement, il faut finalement revoir notre rapport à la nature. Alors que traditionnellement la nature est mise de côté dans la discipline historique, l’histoire universelle propose d’éliminer la distinction entre histoire humaine et histoire naturelle afin de refaire le lien entre l’homme et la nature et ainsi jeter la lumière sur l’importance de notre interaction avec l’environnement »9.
Pour David Christian, d’ici le milieu du XXIe siècle, tous les historiens comprendront qu’il est possible et fructueux d’explorer le passé à de multiples échelles, dont beaucoup s’étendent bien au-delà de la longue durée de Braudel, en remontant aux origines de notre espèce, aux origines de la terre et même aux origines du cosmos. La nouvelle histoire universelle transcendera les frontières disciplinaires existantes, exploitant les puissantes synergies intellectuelles disponibles pour ceux qui sont prêts à déployer les méthodes et les idées de multiples disciplines10.
A propos de Maps of time, William McNeill a écrit : « Here, then, is a historical and intellectual masterpiece: clear, coherent, erudite, elegant, venturesome, and concise. It offers his readers a magnificent synthesis of what scholars and scientists have learned about the world around us in the past hundred years, showing how strangely, yet profoundly, human societies remain a part of nature, properly at home in the universe despite our extraordinary powers, unique self-consciousness, and inexhaustible capacity for collective learning ».

Dipesh Chakrabarty, quant à lui, expose ses réflexions sur l’analyse de l’impact humain dans le dérèglement climatique dans « The Climate of History : Four Theses » (Critical Inquiry, 35, 2009, p. 197-222). Il tente de comprendre comment les changements climatiques transforment notre manière de concevoir l’humanité et comment cela remet en question notre compréhension de l’histoire. Chakrabarty défend le passage à l’Anthropocène : il ne s’agit plus de penser que l’humain a toujours partagé des interactions avec la nature, mais de comprendre qu’aujourd’hui, son action a un impact réel sur la planète. L’être humain est devenu un agent géologique.

Thèse 1 : Les explications anthropiques du changement climatique signifient l’effondrement de la distinction humaniste séculaire entre histoire naturelle et histoire humaine.

Elles font des Hommes du XXIe siècle des agents biologiques (aussi bien individuellement que collectivement) et des agents géologiques (ce qui nous une force de la même ampleur que celle libérée à d’autres moments où il y a eu une extinction massive d’espèces ; notre empreinte n’a pas toujours été aussi grande, mais le processus s’est affirmé dans la seconde moitié du XXe siècle).

Thèse 2 : L’idée de l’Anthropocène, la nouvelle époque géologique où les humains existent en tant que force géologique, qualifie sévèrement les histoires humanistes de modernité/mondialisation.

Cette idée d’une nouvelle ère géologique, l’ère de l’Anthropocène, a été proposée au tournant du siècle par Paul Crutzen et Eugene Stoermer. Paul Crutzen a obtenu le Prix Nobel de chimie en 1995. La théorie de l’Anthropocène repose sur l’idée qu’au cours des trois derniers siècles, les effets de l’homme sur l’environnement mondial se sont intensifiés. En raison de ces émissions anthropiques de dioxyde de carbone, le climat mondial pourrait s’écarter considérablement du comportement naturel pendant de nombreux millénaires à venir. C’est une époque géologique dominée par l’homme, complétant l’Holocène (la période chaude des 10 à 12 derniers millénaires). On pourrait dire que l’anthropocène a commencé dans la dernière partie du XVIIIe siècle, lorsque les analyses de l’air piégé dans la glace polaire ont montré le début de concentrations mondiales croissantes de dioxyde de carbone et de méthane. Cette date coïncide également avec l’industrialisation et la conception de la machine à vapeur par James Watt en 1784.

Thèse 3 : L’hypothèse géologique concernant l’anthropocène nous oblige à mettre en conversation les histoires globales du capital avec l’histoire des espèces humaines.

Les cadres analytiques engageant les questions de liberté par le biais de critiques de la mondialisation capitaliste ne sont en aucun cas devenus obsolètes à l’ère du changement climatique. La problématique de la mondialisation ne nous permet de lire le changement climatique que comme une crise de gestion capitaliste. S’il est indéniable que le changement climatique a profondément à voir avec l’histoire du capital, une critique qui n’est qu’une critique du capital n’est pas suffisante pour aborder les questions relatives à l’histoire humaine une fois que la crise du changement climatique a été reconnue et que l’anthropocène a commencé à se profiler à l’horizon de notre présent. Le présent géologique de l’Anthropocène s’est enchevêtré avec le présent de l’histoire humaine.
Sans une telle connaissance de l’histoire profonde de l’humanité, il serait difficile de parvenir à une compréhension séculaire des raisons pour lesquelles le changement climatique constitue une crise pour les humains. Les géologues et les climatologues peuvent expliquer pourquoi la phase actuelle du réchauffement climatique – par opposition au réchauffement de la planète qui s’est produit auparavant – est de nature anthropique, mais la crise qui s’ensuit pour les humains n’est pas compréhensible à moins de comprendre les conséquences de ce réchauffement. Les conséquences n’ont de sens que si nous considérons les humains comme une forme de vie et considérons l’histoire humaine comme faisant partie de l’histoire de la vie sur cette planète. Car, en fin de compte, ce que le réchauffement de la planète menace, ce n’est pas la planète géologique elle-même, mais les conditions mêmes, à la fois biologiques et géologiques, dont dépend la survie de la vie humaine telle qu’elle s’est développée à l’Holocène.
Le mot que des érudits tels que Wilson ou Crutzen utilisent pour désigner la vie sous la forme humaine – et dans d’autres formes vivantes – est espèce. Ils parlent de l’être humain en tant qu’espèce et trouvent cette catégorie utile pour réfléchir à la nature de la crise actuelle. C’est un mot qui n’apparaîtra jamais dans aucune histoire standard ou analyse politico-économique de la mondialisation par les chercheurs de gauche, car l’analyse de la mondialisation se réfère, pour de bonnes raisons, uniquement à l’histoire récente et enregistrée de l’homme. La pensée des espèces, d’autre part, est liée à l’entreprise de l’histoire profonde.
Dans un essai historique publié en 1995 et intitulé « World History in a Global Age », Michael Geyer et Charles Bright ont écrit qu’en ce qui concerne l’histoire du monde, il n’y a pas d’esprit universalisant… Il y a, au contraire, de nombreuses pratiques très spécifiques, très matérielles et pragmatiques qui attendent une réflexion critique et une étude historique. Pourtant, grâce aux connexions mondiales forgées par le commerce, les empires et le capitalisme, nous sommes confrontés à une nouvelle condition surprenante : l’humanité, qui a été le sujet de l’histoire du monde pendant de nombreux siècles et civilisations, est maintenant du ressort de tous les êtres humains. Cette humanité est extrêmement polarisée entre riches et pauvres11. Pourtant, cette « humanité » ne forme jamais une seule civilisation homogène. Les scientifiques qui défendent l’idée de l’Anthropocène défendent exactement le contraire. Ils soutiennent que parce que les humains constituent un type particulier d’espèces, ils peuvent, dans le processus de domination d’autres espèces, acquérir le statut d’une force géologique. En d’autres termes, les humains sont devenus une condition naturelle, du moins aujourd’hui. Comment créer une conversation entre ces deux positions ?
L’idée d’espèce, on le craint, en outre, peut introduire un degré puissant d’essentialisme dans notre compréhension des humains.
Pourtant, des doutes subsistent quant à l’utilisation de l’idée d’espèces dans le contexte du changement climatique, et il serait bon d’en traiter un qui peut facilement surgir parmi les critiques de gauche. On pourrait objecter, par exemple, que tous les facteurs anthropiques contribuant au réchauffement climatique – la combustion de combustibles fossiles, l’industrialisation du bétail, le défrichement des forêts tropicales et autres, etc. – font après tout partie d’une histoire plus vaste : le déploiement du capitalisme en Occident et la domination impériale ou quasi-impériale par l’Occident du reste du monde. C’est de cette histoire récente de l’Occident que l’élite de la Chine, du Japon, de l’Inde, de la Russie et du Brésil a puisé son inspiration pour tenter de développer ses propres trajectoires vers la politique de superpuissance et la domination mondiale par la puissance économique, technologique et militaire capitaliste. Si cela est globalement vrai, alors le discours sur les espèces ou l’humanité ne sert-il pas simplement à cacher la réalité de la production capitaliste et la logique de domination impériale – formelle, informelle ou machinique au sens deleuzien – qu’elle favorise ? Pourquoi devrait-on inclure les pauvres du monde – dont l’empreinte carbone est de toute façon faible – en utilisant des termes aussi inclusifs que l’espèce ou l’humanité alors que la responsabilité de la crise actuelle devrait être carrément imputée aux nations riches en premier lieu et aux classes les plus riches dans les plus pauvres ? Nous devons rester avec cette question un peu plus longtemps ; sinon, la différence entre l’historiographie actuelle de la mondialisation et l’historiographie exigée par les théories anthropiques du changement climatique ne nous paraîtra pas claire. Bien que certains scientifiques voudraient dater l’Anthropocène de l’époque où l’agriculture a été inventée, notre chute dans l’Anthropocène n’était ni un événement ancien ni inévitable. La civilisation humaine n’a certainement pas commencé à condition qu’un jour de son histoire, l’homme doive passer du bois au charbon et du charbon au pétrole et du gaz. Kenneth Pomeranz a démontré avec force qu’il y avait beaucoup de contingence historique dans la transition du bois au charbon comme principale source d’énergie. Les coïncidences et les accidents historiques jonchent de la même manière les histoires de la « découverte » du pétrole, des magnats du pétrole et de l’industrie automobile comme elles le font pour toute autre histoire. Les sociétés capitalistes elles-mêmes ne sont pas restées les mêmes depuis le début du capitalisme. La population humaine, elle aussi, a considérablement augmenté depuis la Seconde Guerre mondiale.

Thèse 4 : Le croisement de l’histoire des espèces et de l’histoire du capital est un processus de sonde des limites de la compréhension historique.

Lorsque Wilson recommande ensuite, dans l’intérêt de notre avenir collectif, que nous parvenions à la compréhension de soi en tant qu’espèce, l’énoncé ne correspond à aucune façon historique de comprendre et de relier le passé à l’avenir en supposant qu’il existe un élément de continuité avec l’expérience humaine. Nous, les humains, ne nous expérimentons jamais en tant qu’espèce. Nous ne pouvons que comprendre intellectuellement ou déduire l’existence de l’espèce humaine, mais ne jamais l’expérimenter en tant que telle.  La discussion sur la crise du changement climatique peut donc produire des effets et des connaissances sur les passés et les futurs humains collectifs qui fonctionnent aux limites de la compréhension historique. Nous subissons les effets spécifiques de la crise, mais pas l’ensemble du phénomène. Le mur entre l’histoire humaine et l’histoire naturelle a été brisé. Nous ne nous attendions peut-être pas nous-mêmes en tant qu’agent géologique, mais nous semblons en être devenus un au niveau de l’espèce. Et sans cette connaissance qui défie la compréhension historique, il n’y a pas de sens à la crise actuelle qui nous affecte tous. Le changement climatique, réfracté par le capital mondial, va sans aucun doute accentuer la logique d’inégalité qui traverse la domination du capital ; Certaines personnes gagneront sans doute temporairement aux dépens des autres. Mais toute la crise ne peut pas être réduite à une histoire de capitalisme. Contrairement aux crises du capitalisme, il n’y a pas de canots de sauvetage ici pour les riches et les privilégiés. L’inquiétude suscitée par le réchauffement climatique rappelle les jours où beaucoup craignaient une guerre nucléaire mondiale. Mais il y a une différence très importante. Une guerre nucléaire aurait été une décision consciente de la part des pouvoirs en place. Le changement climatique est une conséquence involontaire des actions humaines et montre, uniquement par l’analyse scientifique, les effets de nos actions en tant qu’espèce. Species peut en effet être le nom d’un espace réservé pour une nouvelle histoire universelle émergente des humains qui surgit au moment du danger qu’est le changement climatique. Mais nous ne pourrons jamais comprendre cet universel.

Notes

  1. David Christian, « World History in Context », Journal of World History, 14, 2003, p. 437-458, p. 439-440.
  2. David Christian est né aux Etats-Unis mais fait des études au Canada et en Angleterre. Ses premiers travaux portent sur l’histoire de la Russie. Puis, il donne un premier cours sur la Big History en 1989. En 2005, il publie Maps of Time : an Introduction to Big History, puis Big History : Between Nothing and Everything en 2014 et Origin Story : a Big History of Everything en 2018. David Christian est également président de l’International Big History Association fondée en avril 2011.
  3. René-Eric Dagorn, « Big History et histoire environnementale », dans Laurent Testot (dir), Histoire globale. Un autre regard sur le monde, Editions Sciences Humaines, 2015, p. 196-205, p. 199. Dans « The Case for ‘Big History’ » (Journal of World History, 2, 1991, p. 223-238), David Christian prend plusieurs exemples et démontre que les échelles de temps utilisées par les historiens ne sont pas les plus pertinentes : la question de la croissance économique et démographique ne doit pas être étudiée depuis les premières sociétés urbanisées il y a 5000 ans mais depuis l’apparition de l’Homo Sapiens il y a 250 000 ans. D’autre part, ces questionnements à grande échelle permettent aussi de s’interroger sur l’avenir de la planète et de l’univers, notamment en termes d’équilibre climatique et énergétique, sous l’ère de l’Anthropocène.
  4. Barbara Weinstein, « History without a Cause ? Grand Narratives, World History, and the Postcolonial Dilemma », International Review of Social History, 50, 2005, p. 71-93 ; David Christian, « The Return of Universal History », History and Theory, 49, 2010, p. 6-27 ; Gérald Sfez, Logiques du vif, L’Harmattan, 2016 (chapitre 2 : la raison postmoderne, p. 59-114).
  5. Dans l’introduction de Origin Story. A Big History of Everything (Penguin, 2012), David Christian décrit assez bien la tradition des mythes des origines : « In my imagined twilight conversations around the fire, there are girls and boys, older men and women, and parents and grandparents, some wrapped in animal furs and cradling babies. Children are chasing one another at the edge of the lake while adults are finishing a meal of mussels, freshly caught fish and yabbies, and wallaby steak. Slowly, the conversation becomes serious and is taken over by one of the older people. As on many long summer days and cold winter nights, the older people are retelling what they have learned from their ancestors and teachers. They are asking the sort of questions that have always fascinated me : How did the landscape, with its hills and lakes, its valleys and ravines, take shape ? Where do the stars come from? When did the first humans live, and where did they come from ? Or have we always been here ? Are we related to goannas and wallabies and emus ? (The answer of both the Lake Mungo people and modern science to that last question is a decisive “Yes !”) The storytellers are teaching history. They are telling stories about how our world was created by powerful forces and beings in the distant past. Told over many nights and days, their stories describe the big paradigm ideas of the Lake Mungo people. These are the ideas with long legs, the ideas that can stay the course. They fit together to form a vast mosaic of information about the world. Some of the children may find parts of the stories too complex and subtle to take in at first hearing. But they hear the stories many times in different tellings, and they get used to them and to the deep ideas inside the stories. As the children get older, the stories get under their skin. They come to know them intimately and better appreciate their beauty and their subtler details and meanings. As they talk about the stars, the landscape, the wombats and the wallabies, and the world of their ancestors, the teachers build a shared map of understanding that shows members of the community their place in a rich, beautiful, and sometimes terrifying universe : This is what you are ; this is where you came from; this is who existed before you were born; this is the whole thing of which you are a small part ; these are the responsibilities and challenges of living in a community of others like yourself. The stories have great power because they are trusted. They feel true because they are based on the best knowledge passed down by ancestors over many generations. They have been checked and rechecked for accuracy, plausibility, and coherence using the rich knowledge of people, of stars, of landscapes, of plants and animals available to the Mungo community and to their ancestors and neighbors. We can all benefit from the maps our ancestors created […]. Without them, people could fall into a sens of despair and meaningless so profound, it might drive them to suicide » (p. 13-15).
  6. « Collective learning ensures that human history, unlike that of other species, is a process of accumulation and acceleration, and it is this process of cumulative and accelerating adaptation to the natural environment that is traced in world history. All in all, collective learning is so powerful and adaptive mechanism that there is a case for arguing that it plays an analogous role in human history to that of natural selection in the histories of other organisms » (David Christian, « World History in Context », Journal of World History, 14, 2003, p. 437-458, p. 446) ; « How can we explain this remarkable capacity for sustained and accelerating adaptation that seems to be a new emergent property of our species and the primary driver of change in human history? I have argued elsewhere that the key is the remarkable precision and fluency of human language, which allowed humans alone to share learned knowledge so precisely and in such volume that it could accumulate with minimal degradation within the memory banks of entire communities. Human language linked humans into highly efficient information networks through which the learning of each individual could be shared, added to, and passed on to future generations. The slow mechanism of genetic inheritance was overlaid by the much faster mechanism of knowledge transfer. The long-term trends that make human history so different are driven, in other words, by a new and more rapid adaptive mechanism that we can call ‘collective learning’ » (David Christian, « The Return of Universal History », History and Theory, 9, 2010, p. 6-27, p. 24) ; « Collective learning is what gives humans a history, because it means that the ecological skills available to humans have changed over time. And there is a clear directionality to this process. Over time, processes of collective learning ensure that humans as a species will get better at extracting resources from the environment, and their increasing ecological skills ensure that, over time, human populations will increase. Generalizations about collective learning cannot predict the exact timing or geography of such processes, of course, nor how far they are likely to proceed, nor their detailed consequences; but such generalizations can tell us something about the long-term shape of human history on large timescales. To get a feeling for the power of collective learning, it is enough to imagine life as it might be if we had to learn everything from scratch, receiving little more from family or community than hints about appropriate social behavior and eating habits, which is more or less the intellectual heritage of young chimps. How many of the artifacts around us (each of which embodies stored knowledge) could we invent or construct in a lifetime ? Asking such questions is a powerful reminder of the extraordinary extent to which our lives as individuals depend on the accumulated knowledge of millions of other humans over many generations. Humans as individuals are not that much cleverer than chimps or Neanderthals; but as a species we are vastly more creative because our knowledge is shared within and between generations. All in all, collective learning is so powerful an adaptive mechanism that one might argue it plays a role in human history analogous to that of natural selection in the histories of other organisms » (David Christian, Maps of Time : an Introduction to Big History, University of California Press, 2005 p. 147).
  7. Voir par exemple Alfred Crosby, The Columbian Exchange : Biological and Cultural Consequences of 1492, Greenwood Press, 1972 ; John Gribbin, Genesis : the Origins of Man and the Universe, Delacrote Press, 1981 ; Alfred Crosby, The Biological Exoansion of Europe, 900-1900, Cambridge University Oress, 1986 ; Brian Fagan, The Journey From Eden : the Peopling of our World, Thames and Hudson, 1990 ; B. L. Turner II, William Clark, Robert Kates, John Richards, Jessica T. Mathews, William Meyer (dir), The Earth as Transformed by Human Action. Global and Regional Changes in the Biosphere over the Past 500 Years, Cambridge University Press, 1990 ; John McNeill, « Of Rats and Men : a Synoptic Environmental History of the Island Pacific », Journal of World History, 5, 1994, p. 299-349 ; Ben Finney, « The Other One-Third of the Globe », Journal of World History, 5, 1994, p. 273-297 ; Stephen Sanderson, Social Transformations : a General Theory of Historical Development, Blackwell, 1995 ; Clive Gamble, Timewalkers, Penguin, 1995 ; Fred Spier, The Structure of Big History : From the Big Bang until Today, Amsterdam University Press, 1996 ; David Keys, Catastrophe : an Investigation into the Origins of Modern Civilization, Century, 1999 ; I. G. Simmons, Changing the Face of the Earth : Culture, Environment, History, Blackwell, 1996 ; Jared Diamond, Guns, Germs, and Steel : the Fates of Human Societies, Norton, 1997 ; John McNeill, Something New Under the Sun : an Environmental History of the Twentieth-Century World, Norton, 2000 ; Andrew Goodie, The Human Impact on the Natural Environment, Blackwell, 2000 ; Jean Baechler, Esquisse d’une histoire universelle, Fayard, 2002 ; Steven Mithen, After the Ice : a Global Human History, Orion Books, 2003 ; B. de Vrie, Johan Goudsblom (dir), Mappae Mundi : Humans ant their Habitats in a Long-Term Socio-Ecological Perspective, Amsterdam University Press, 2002 ; Jared Diamond, Collapses : How Societies Choose to Fail or Succeed, Viking Press, 2005 ; Charles Mann, 1491 : New Revelations of the Americas Before Columbus, Vintage Book, 2005 ; Alf Hornborg, Carole L. Crumley, The World System and the Earth System, Global Socioenvironmental Change and Sustainability Since the Neolithic, Routledge, 2006 ; Sing Chew, « Dark Ages : Ecological Crisis Phases and System Transition », dans Barry Gills, William Thompson (dir), Globalization and Global History, Routledge, 2006, p. 149-183 ; Cynthia Stokes Brown, Big History From the Big Bang to the Present, New Press, 2007 ; Christian Grataloup, Géohistoire de la mondialisation, Armand Colin, 2007 ; Alf Hornborg, Alier Martínez, John McNeill, John Robert, Immanuel Wallerstein, Rethinking Environmental History, World-System History and Global Environmental History, Altamira Press, 2007 ; Edmund Burke III, Kenneth Pomeranz (dir), The Environment and World History, University of California Press, 2009 ; Fred Spier, Big History and the Future of Humanity, Wiley-Blackwell, 2010 ; Yuval Noah Harari, Sapiens: A Brief History of Humankind, 2011; Laurent Testot, Cataclysmes : une histoire environnementale de l’humanité, Payot, 2017.
  8. Paul Crutzen, Eugene Stoermer, « The Anthropocene », International Geosphere-Biosphere Programme Newsletter, 41, 2000 ; Paul Crutzen, « Geology of Mankind », Nature, 3 janvier 2002. Voir aussi Will Stephen, Paul Crutzen, John McNeill, « The Anthropocene : Are Humans Now Overwhelming the Great Forces of Nature ? », Ambio, 36, 2007, p. 614-621 ; David Christian, « The Anthropocene », Berkshire Encyclopedia of World History, Berkshire Publishing, 2010 ; Stefen Will, Wendy Broadgate, Lisa Deutsch, Owen Gaffney, Cornelia Ludwig, « The trajectory of the Anthropocene : the Great Acceleration », The Anthropocene Review, 2015, p. 1-18.
  9. Florence Prévost, « Le retour de l’histoire universelle : une façon de changer le rapport au conflit ? », Conflits et sociétés, 34, 2017, p. 219-234, p. 227.
  10. « I predict that in fifty years’ time, all historians will understand that it is possible and fruitful to explore the past on multiple scales, many extending far beyond Braudel’s longue durée, by reaching back to the origins of our species, the origins of the earth, and even the origins of the cosmos. The new universal history will transcend existing disciplinary boundaries, exploiting the powerful intellectual synergies available to those willing to deploy the methods and insights of multiple disciplines » (« The Return of Universal History », History and Theory, 49, 2010, p. 6-27, p. 7).
  11. « At the end of the twentieth century, we encounter, not a universalizing and single modernity but an integrated world of multiple and multiplying modernities. As far as world history is concerned, there is no universalizing spirit, no Weltgeist, to be re/presented working its way out in history. There are, instead, many very specific, very material and pragmatic practices that await critical reflection and historical study. At the same time, there is no particular knowledge to be generalized or built up from these discrete practices into a general theory or global paradigm […]. We confront a startling new condition : humanity, which has been the subject of world history for many centuries and civilizations, has now come into the purview of all human beings. This humanity is extremely polarized into rich and poor, powerful and powerless, vociferous and speechless, believers and non-believers » (Michael Geyer, Charles Bright, « World History in a Global Age », American Historical Review, 100, 1995, p. 1034-1060, p. 1058-1059).