L’ouvrage de Pierre Vermeren retrace l’histoire des pratiques mises en œuvre au cœur de l’empire colonial français. Il raconte la découverte de l’Islam au début du XIXe siècle, les aléas de la protection des chrétiens d’Orient, la relation au judaïsme, les missions et la politique du « royaume arabe ». Pierre Vermeren analyse la manière dont la République laïque a piloté les religions et les réactions suscitées en Afrique du Nord, notamment la montée du salafisme. Il s’agit d’une histoire dont la durée dépasse le sujet de la question d’agrégation. Seuls les chapitres traitant des relations entre empire colonial et religions entre 1884 et 1962 sont traités ici.

  • Chapitre XIII – La laïcité de 1905 et l’Algérie
  • Chapitre XIV – L’islam, « patrie de référence identitaire » des Français musulmans d’Algérie
  • Chapitre XVIII – La IIIe République et Lyautey face au sultan du Maroc : l’islam sanctuarisé et instrumentalisé
  • Chapitre XIX – Les musulmans dans la Grande Guerre et l’affaire de la mosquée de Paris
  • Chapitre XXII – 1930 en Afrique du Nord : Le point de bascule

Chapitre XIII – La laïcité de 1905 et l’Algérie

1. Contexte historique : la séparation de l’Église et de l’État en métropole

La IIIe République engage un combat contre l’influence de l’Église catholique, perçue comme un obstacle à la modernité républicaine. Ce conflit s’intensifie après la crise du boulangisme, l’affaire Dreyfus et les élections du Bloc des gauches en 1902.

Parmi les figures majeures de cette offensive laïque :
• Émile Combes (1835-1921), président du Conseil et anticlérical convaincu, mène la fermeture des écoles congréganistes et expulse des milliers de religieux (1903-1904).
• Aristide Briand (1862-1932), député socialiste, joue un rôle clé en tant que rapporteur de la loi de 1905, en recherchant un compromis avec une partie des catholiques modérés.
• Ferdinand Buisson (1841-1932), philosophe protestant, théorise le concept moderne de laïcité, distinct de l’hostilité à la religion.

La loi du 9 décembre 1905 consacre la séparation entre l’État et les Églises :
• Article 1 : garantit la liberté de conscience et le libre exercice des cultes.
• Article 2 : interdit à l’État de financer ou reconnaître un culte.
• Articles 4 et 11 : placent les biens de l’Église sous gestion d’associations cultuelles, provoquant un conflit avec le Vatican.

Cependant, son application en Algérie fait immédiatement débat, car la colonie repose sur un encadrement strict du religieux, notamment de l’islam.

2. Un régime dérogatoire pour l’Algérie (1907) : maintien du contrôle colonial

L’Algérie, malgré son statut de territoire français, bénéficie d’un régime d’exception avec le décret du 27 septembre 1907. Ce texte, conçu sous l’influence de Charles Jonnart (1857-1927), gouverneur général d’Algérie, cherche à maintenir le contrôle des cultes pour des raisons politiques et sécuritaires.

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