Cette fiche analyse un événement en partie oublié de l’histoire des campagnes françaises au XIXe siècle: la Guerre des Demoiselles. Après la Révolution française et avant 1848, les paysans de plusieurs localités montagnardes et forestières des Pyrénées se sont révoltées contre la volonté centralisatrice de l’Etat qui a décidé, depuis Paris, de réglementer l’usage des forêts. Le nouveau Code forestier néglige totalement les habitudes locales et perturbe les équilibres fragiles de la survie de ces populations installées dans un environnement précaire. L’Etat et ses représentants doivent alors faire face à une révolte qui semblait dépassée, et qui prend une forme parfaitement inattendue.
La Guerre des Demoiselles est un exemple un peu anachronique des émotions populaires d’Ancien Régime, dans un siècle qui se veut moderne, dans une région qui préfère maintenir ses traditions et ses habitudes plutôt que d’accepter le Progrès industriel et de s’y adapter.
INTRODUCTION
La « Guerre des Demoiselles » est une rébellion rurale qui a secoué les forêts de l’Ariège de 1829 à 1832, c’est-à-dire sur deux monarchies, entrecoupée par les Trois Glorieuses de Juillet 1830. Elle se poursuit de manière intermittente jusqu’en 1872. Il s’agit du mouvement de contestation le plus connu des Pyrénées au XIXe siècle. Le nom de cette révolte vient du fait que les paysans y apparaissent déguisés en femmes, portant des robes et des perruques, le visage noirci au charbon, et sortent la nuit pour attaquer les grands propriétaires, les gardes forestiers, les gendarmes, les maîtres de forges.
HISTORIOGRAPHIE
La Guerre des Demoiselle a été étudiée en 1969 par François Baby (La guerre des demoiselles, 1829-1872, 1972) qui insiste sur le rôle du folklore dans la révolte. Il insiste à la fois sur les revendications très sérieuses des paysans, mais aussi sur les formes étonnantes de la révolte qui s’inscrit dans la coutume du Carnaval, mêlant à la fois la contestation et le folklore.
En 1994, l’historien américain Peter Sahlins (Forest Rites. The War of the Demoiselles in Nineteenth-Century France, 1994) reprend le dossier et en fait une ethno-histoire : il démontre que la révolte respecte tous les codes et toutes les pratiques de la culture paysanne. La forêt est encore un espace de vie sacralisé, où les fées et les lutins occupent une place importante, et où les jeunes hommes des villages jouent un rôle capital dans la préservation des coutumes, des croyances et des mythes.
Plus récemment, Jean-François Soulet (Les Pyrénées au XIXe siècle : l’éveil d’une société civile, 2004) replace cette guerre dans la mouvance des contestations collectives depuis l’Ancien Régime. C’est l’illustration de la résistance de la société civile et paysanne, éloignée de Paris, face à l’entreprise centralisatrice de l’Etat.
CONTEXTE
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