Fiche de lecture d’un des articles parus dans le manuel de concours Etat, pouvoirs et contestations aux Editions de la Sorbonne en 2020. L’ouvrage fait suite à un colloque sur la même question organisé en novembre 2018. Ici, Stéphane Haffemayer, spécialiste de la presse française et anglaise au XVIIe siècle, s’intéresse particulièrement à la communication politique avant la guerre civile et la révolution anglaise. Il montre l’usage majeur de la presse d’opinion entre l’abolition de la Star Chamber et les mois qui suivent la fuite de Charles Ier. Selon lui, une guerre de plume multiforme a précédé la guerre civile. L’intérêt des historiens britanniques pour la notion de sphère publique s’est traduit par de nombreux travaux reliant l’information et la pensée politique. Cette analyse vise à démontrer la portée idéologique de la construction médiatique des années 1640 à Londres, une véritable « révolution des médias ».
En Angleterre comme en France, la crise du pouvoir monarchique au cours des années 1640 fut marquée par une « révolution des médias », c’est-à-dire l’irruption soudaine d’une vague de textes de nature hautement politique, dans un environnement intellectuel soudainement libéré : le 5 juillet 1641, la suppression de la censure épiscopale entraînée par l’abolition de la Star Chamber (« Chambre étoilée ») mit fin à la législation la plus répressive qui fût contre le commerce du livre et ouvrit la voie à la publication de milliers de textes polémiques.
On voit alors apparaître des formes traditionnelles comme des pamphlets, des broadsides ballads, des gravures, des pétitions, des textes parlementaires, mais aussi des formes nouvelles comme les newsbooks, les premiers périodiques d’information politique. L’historiographie whig considère que cette libération de la parole fait partie des grandes conquêtes de la révolution.
Pour l’auteur, la théorie habermassienne de l’espace public n’est pas adaptée au XVIIe siècle : au-delà du symbole de liberté que représentent l’ouverture d’un espace de communication politique et la publicité soudaine des idées, la création de la première presse d’opinion n’est en rien la garantie du modèle délibératif et raisonné identifié par Jürgen Habermas ! La notion de nouveauté est très relative puisqu’en 1620 déjà, les Weekly News, imprimés à Londres, traduisaient les corantos hollandais et rapportaient l’actualité étrangère dans le style des gazettes européennes. Il y était expressément interdit par la monarchie d’évoquer les affaires du royaume : l’année suivante, le Conseil privé refusa la demande de l’intelligencer John Pory de rédiger une gazette traitant des matières politiques intéressant l’ensemble de l’Etat.
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