Quelques remarques générales sur les minorités juives d’Espagne au moyen âge issues de l’ouvrage de Joseph Pérez “ los judíos en España” publié en 2005 à Madrid. Ce livre constitue une bonne mise au point des connaissances acquises sur le sujet à cette date. Georges Pérez né en 1931 est un hispaniste français reconnu des deux côtés de Pyrénées.
Remarques préalables.
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La présence de communautés juives dans la péninsule hispanique relève de l’histoire de la longue durée qui remonte à l’Antiquité et qui s’achève de façon dramatique par l’expulsion des juifs décrétée par les rois catholiques en 1492.
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Les juifs d’Espagne au moyen âge ont toujours constitué une minorité, du point de vue démographique ( 5 % de la population?) et surtout du point de vue politique: minorité soumise et dominée par les musulmans et/ou chrétiens. C’est ce qui les distingue des autres communautés religieuses présentes dans la péninsule ibérique au Moyen âge. En effet, les chrétiens et les musulmans ont pu , selon les circonstances politico-militaires liées à la Reconquista, appartenir appartenir soit au groupe dominant ou soit faire partie de minorités dominées: les Mozarabes qui sont les chrétiens vivant en Al-Andalus ; les mudejares qui sont les musulmans vivant dans les royaumes chrétiens.
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L’auteur, en accord avec la majorité des historiens actuels, considère que «l’Espagne des 3 cultures», où musulmans, juifs et chrétiens auraient vécu en harmonie dans un univers empreint de tolérance est un mythe. Le terme «tolérance» doit être compris dans le sens négatif du terme: «supporter, souffrir quelque chose considéré comme mauvais, mais que l’on se dispense de punir. ». Le concept moderne de la tolérance liée à la liberté de conscience est issue de la philosophie des Lumières et n’existe pas au Moyen âge. Selon l’auteur,« au moyen âge, chrétiens, musulmans et juifs étaient tous convaincus que leur religion était la seule véritable, à l’exclusion de toutes les autres qui étaient, par conséquent, considérées comme fausses. » (P. 48-49).
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Cette remarque revêt plusieurs conséquences pour l’étude des minorités juives d’Espagne au moyen âge. Il n’y a jamais eu de véritable « âge d’or » pour les juifs en Espagne (pas plus que pour les autres minorités religieuses…), même si ceux-ci ont pu aux moments des persécutions idéaliser rétrospectivement leur passé. La tolérance et la relative sécurité dont ils ont pu bénéficier parfois pendant de longues périodes doivent être analysées à la lumière de circonstances historiques changeantes: évolution politique (attitude des princes à leur égard), évolution religieuse, situation démographique ( nécessité de peupler ou repeupler les territoires conquis), situation économique et sociale (prospérité/crise). L’histoire des minorités juives s’insère donc pleinement dans l’histoire générale de l’Espagne au moyen âge qu’il est nécéssaire de connaître dans ses grandes lignes pour appéhender pleinement le sujet.
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L’auteur soutient la thèse selon laquelle « l’Espagne médiévale n’a connu que deux cultures dominantes et dominatrices, d’abord la musulmane, puis la chrétienne ; les juifs se sont incorporés dans la première, puis dans la seconde, mais de culture juive, il n’y a pas eu, à moins qu’on veuille nommer ainsi, dans un sens restreint, l’ensemble des normes religieuses et spirituelles qui régissaient les aljamas. Les juifs continuèrent à être juifs en Al- Andalus du point de vue religieux, mais pour tout le reste, ils adoptèrent les modèles culturels dominants, en premier lieu la langue (…) Au fond, les juifs se sont assimilés dans la culture dominante, musulmane, puis chrétienne. » (p.46)