Cela peut relever de l’évidence, mais lorsque l’on parle de frontière, on fait directement référence à une ligne de front, et donc à un affrontement pour exercer son autorité, sa souveraineté, sur un territoire. La notion de frontière « naturelle », même si un cours d’eau ou une chaîne de montagnes facilite les choses, et souvent abordé comme un argument qui permet de justifier une extension. La convention, pendant la révolution française avait utilisé cet argument pour justifier sa volonté de conquête de la rive gauche du Rhin.

Lors du festival de géopolitique de Grenoble une lecture critique de l’effacement des frontières a été proposé à travers un regard historique et géographique. L’union européenne propose une approche fonctionnelle de la frontière, comme un héritage qu’il faudrait dépasser. À l’évidence pour une partie des populations européennes il y a une sous-estimation des dimensions politiques et symboliques de ces frontières.

Dans la perspective des concours internes de l’armée de terre, la notion de frontière, indépendamment de son aspect militaire, s’inscrit dans une démarche qui peut être spécifique.
Pour autant, le préparant du concours qui a conçu cette contribution s’est emparé du sujet pour répondre clairement à cette question, dans le cadre des attentes de l’institution.

Suite aux attaques terroristes qui ont durement frappé la France, cette dernière a dû à plusieurs reprises fermée rétablir les contrôles aux frontières.

Derrière ce constat se pose alors la question de l’effacement des frontières. La complexité de cette question se signale aujourd’hui par des enjeux liés à des dimensions politiques mais aussi symboliques.

 

Idée maîtresse:

Pour répondre à cette question posée, je pense qu’une Europe sans frontière relève davantage du mythe de par les dimensions matérielles et géographiques de celle-ci ; ce qui sera l’objet de ma première partie. Toutefois et c’est ce que nous allons voir dans un deuxième temps, il peut exister d’une certaine manière une absence de frontière. Enfin je montrerais dans un troisième temps qu’il existe cependant un paradoxe pour une Europe sans frontière.

 

Une idée qui relève du mythe.

De par sa définition, la frontière est une limite de souveraineté ainsi qu’une ligne de séparation. C’est une construction territoriale qui met de la distance dans la proximité. Il existe donc une dimension à la fois matérielle et géographique qui explique à la fois cette notion de séparation et de distinction.

C’est un objet d’affirmation d’un pouvoir politique, un objet de protection et de régulation (contrôles/filtrages des entrées et sorties) ainsi qu’un objet de différenciation et pour finir un objet de relations. Ainsi, ces différentes fonctions de la frontière montrent que non seulement la frontière est bien réelle et qu’elle a une raison d’être. Il existe des frontières internes mais aussi des frontières externes.

On peut donc penser en somme que la frontière relève donc du mythe. Mais d’un autre côté, une telle conception peut être discutable. J’en viens ainsi à aborder mon deuxième point.

 

Une volonté de faire lever les barrières

Lors de la construction européenne, l’idée des pères fondateurs étaient la création d’une Europe sans frontières. Cela aurait non seulement eu pour signification le symbole d’une Europe de paix mais aussi le concept de liberté économique.

En 1990 a eu lieu un tournant au sein de l’Europe avec le début de la mise en place d’un système d’ouverture des frontières qui donnera vit à l’espace Schengen en 1995. A partir de là, les citoyens peuvent circuler librement au sein des pays signataires. Dans les années 2000, la frontière est considérée comme un symbole d’échange plus que de séparation. On peut considérer qu’à ce moment là, l’Europe est une région sans frontières internes.

Ainsi donc il ressort cette idée qu’une Europe sans frontière peut relever d’une réalité. Mais il faut aussi considérer l’existence d’un paradoxe pour une Europe sans frontière ce qui m’amène à mon troisième point.

 

Un paradoxe pour une Europe sans frontières

En plus de prendre une dimension matérielle, la frontière peut aussi prendre une dimension géographique. Il existe en effet de nombreuses frontières naturelles qui furent pendant longtemps le moyen de séparation privilégié avant l’existence de frontières dessinées par l’homme. Prenons par exemple la frontière naturelle des Pyrénées entre l’Espagne et la France ou celle du Rhin qui fut pendant longtemps le lieu d’affrontements entre la France et l’Allemagne.

De plus, dans le contexte actuel qui voit la menace terroriste de plus en plus menaçante ainsi que les flux migratoires frappant les pays d’Europe du sud-est – sans compter la menace que fait peser la Russie sur les pays de l’Europe de l’Est – il y a une résurgence du nationalisme dans ces pays. Certains de ces pays ont décidé de fermer leurs frontières et cette montée du nationalisme fait apparaître des tensions au sein de l’Europe. Par ailleurs l’Allemagne a suspendu les accords de Dublin (IV) censés réguler la frontière extérieure tandis que la France a déjà suspendu à trois reprises les accords de Schengen.

En définitive, pour répondre à la question posée, je soutiens qu’une Europe sans frontières relève du mythe car malgré l’existence d’accords censés abolir l’idée de frontière, il existe bel et bien une démarcation interne et externe accentuée par la montée des nationalismes régionaux. Cette situation paradoxale peut s’expliquer par le contexte actuel qui voit l’apparition de tensions internes face à des menaces externes.