Cette fiche de lecture porte sur la 2ère partie du manuel. Elle revient sur la chronologie du sujet (de la Deuxième Guerre Punique à l’avènement de l’empereur Dèce) en lien avec la question des rapports entre la religion (c’est-à-dire les croyances et les pratiques religieuses) et la transformation du pouvoir sous la République puis sous l’Empire.
La première partie est fichée ICI et la quatrième partie ICI.
Deuxième partie : Eléments diachroniques
Chapitre I : Religion et pouvoir durant la Deuxième Guerre Punique (Mathieu Engerbeaud)
Sur le même sujet, voir aussi Mary Beard, John North, Simon Price, La religion de Rome et le colloque de la SOPHAU en 2019.
La Deuxième Guerre Punique est vue par les Romains comme l’une des épreuves les plus marquantes de leur histoire. Les Romains attribuent leurs difficultés à une négligence envers les dieux. Effectivement, le lien étroit entre la communauté civique et le monde divin a été brisé.
C’est au cours de cette guerre que les sources rapportent pour la première fois des faits religieux en grand nombre. Ex les livres 21 à 30 de l’Histoire romaine de Tite-Live. Cependant, il faut garder à l’esprit que Tite-Live n’est ni témoin ni contemporain des faits, les événements historiques ont été réécrit dans une perspective valorisante pour les romains, il s’agit d’une « construction mémorielle » (Kubler, 2018).
1. Naissance et accentuation de la crise religieuse
La guerre a été très tôt encadrée par des rites, des gestes et des croyances. Pour preuve, le calendrier des fêtes religieuses répète chaque année des cérémonies en l’honneur de Mars qui rythment la saison de la guerre, ouverte après le 15 mars et qui s’étend jusqu’à la mi-octobre et qui se clôture par le sacrifice d’un cheval en l’honneur de mars et par la purification des armes.
Les Fétiaux (collège sacerdotal de 20 membres qui gèrent les aspects juridico-religieux de la guerre) sont chargés de procéder à un rite pour notifier l’état de guerre à l’ennemi. Le doyen du collège des Fétiaux, le pater patratus frappe le sol ennemi d’un javelot pour notifier l’état de guerre.
201 av. n. è. : lors de la paix avec Carthage, ce sont les prêtres des Fétiaux qui sont chargés de sacraliser les traités et de conclure rituellement la guerre en sacrifiant un porc à Jupiter.
Cet ensemble de rites, cultes et prières encadrent la guerre afin qu’elle soit conforme au droit sacré. Pour les Romains, la guerre ne peut être déclarée que si elle est juste, elle doit répondre à un tort causé par l’ennemi. Le droit sacré ne tolère qu’un seul casus belli : la guerre juste, le bellum iustum soit une conduite pieuse de la guerre qui promet aux Romains la victoire.
Ex : 149 av. n. è. : lors de la Troisième Guerre Punique, les Romains attaquent Carthage et Carthage se défend : les Romains considèrent que Carthage a violé la clause du traité qui leur interdisait de combattre. Cela a donc servi de casus belli.
La conformité de la guerre est attendue du magistrat chargé de la guerre, auquel on confie l’imperium militaire après une prise d’auspices sur le Capitole. Le magistrat doit donc prendre les auspices avant chaque décision importante, faire les sacrifices, tenir compte des avertissements divins et quant au chef qui ne remplit pas ses obligations religieuses, il risque de rompre la pax deorum qui peut conduire à la défaite militaire.
Lors de la Deuxième Guerre Punique, la rupture de la pax deorum a été annoncée sous forme d’avertissements divins appelés « prodiges ». La crainte grandit progressivement car les Romains ont été battus par Hannibal près du Tessin et près de la Trébie.
> 216 av. n. è. : les Romains blâment l’attitude des chefs militaires et les accusent de causer la colère divine. Cicéron et Tite-Live font de C. Flaminius Nepos l’exemple même du chef qui à cause de son « irresponsabilité » provoque la défaite du lac Trasimène et la mort de 15 000 soldats romains.
Tite-Live rapporte que sa prise de fonction est entachée d’irrégularités. En effet, lors du sacrifice réalisé avant sa prise de fonctions, l’animal s’est enfui et a aspergé la foule de sang / peu de temps avant la défaite, il est tombé de son cheval / en pleine route vers le lac de Trasimène, le porte-enseigne n’a pas réussi à soulever l’enseigne et il meurt quelques heures plus tard sur le champ de bataille.
> 216 av. n. è. : de mauvais prodiges sont annoncés lors de l’entrée en fonction des consuls Varron et Paul-Émile (pluies de pierre, citoyens foudroyés à l’intérieur du pomérium). Ces événements ont été interprétés comme des signes annonciateurs de la défaite de Cannes (48 000 morts dont 80 sénateurs). Son statut de plébéien et d’homme nouveau (homo nouus) ont également favoriser les accusations contre lui.
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